RDC et ZLECAF I Opportunités inédites et défis cruciaux pour une croissance durable

La République Démocratique du Congo (RDC) a ratifié l’accord de la Zone de Libre-Échange Continentale Africaine (ZLECAF) en avril 2022, devenant ainsi le 40ᵉ État membre à s’engager dans ce projet ambitieux d’intégration économique continentale. Cette décision s’inscrit dans une volonté politique affirmée de diversifier les partenariats économiques et d’inscrire la RDC dans une dynamique régionale et panafricaine, portée par le président Félix Tshisekedi. Lors de son allocution du 16 avril 2025, il a souligné : « La ZLECAF offre à la République Démocratique du Congo un marché potentiel de 1,5 milliard de consommateurs, ce qui constitue une opportunité historique pour nos entreprises de s’insérer dans des chaînes de valeur régionales plus complexes et plus rentables. »

Avec une superficie équivalente à un tiers du continent africain et des ressources naturelles abondantes, la RDC est idéalement positionnée pour tirer profit de la ZLECAF. La zone offre un espace commercial intégré qui facilitera l’accès à un marché commun, réduira les barrières tarifaires et non tarifaires, et stimulera les investissements transfrontaliers. Le président Tshisekedi avait alors insisté sur le potentiel de diversification des exportations congolaises, notamment dans les secteurs clés du cacao, du cobalt, du bois, et des produits agricoles transformés.

En effet, la RDC cherche à sortir de sa dépendance historique aux exportations de matières premières brutes, en renforçant la transformation locale pour capturer une plus grande part de la valeur ajoutée.

Pour garantir une mise en œuvre efficiente de la ZLECAF, la RDC a adopté et mis en œuvre plusieurs instruments opérationnels essentiels. Parmi eux :

Il y a tout d’abord les règles d’origine. Ces règles garantissent que seuls les produits fabriqués ou transformés majoritairement sur le continent bénéficient des avantages tarifaires, favorisant ainsi la production locale.

Ensuite, la mise en place du portail de négociation tarifaire en ligne. Ce mécanisme facilite les discussions sur la réduction progressive des droits de douane entre États membres, contribuant à la transparence et à l’efficacité.

Puis, le mécanisme de résolution des obstacles non tarifaires. Permettant de traiter rapidement les entraves commerciales, ce système est essentiel pour fluidifier les échanges et protéger les entreprises contre des pratiques restrictives.

À côté de cela, il y a aussi le Système de Paiement Panafricain (PAPSS), un outil révolutionnaire qui permet d’effectuer des paiements intra-africains rapides, sécurisés et à moindre coût, réduisant la dépendance aux devises étrangères.

Et enfin, L’Observatoire africain du commerce. Cette plateforme offre des données en temps réel sur les flux commerciaux, aidant à la prise de décisions stratégiques.

En décembre 2024, la RDC a validé sa stratégie nationale de mise en œuvre de la ZLECAF. Cette feuille de route ambitieuse est axée sur le développement industriel et la transformation locale des ressources, en particulier dans les secteurs porteurs comme la chaîne de valeur des batteries et des véhicules électriques, en lien avec la transition énergétique mondiale. La RDC, à en croire ses dirigeants, doit devenir un hub industriel régional, capable de produire localement des biens à forte valeur ajoutée, tout en répondant aux normes internationales. Cela passe par une politique industrielle volontariste et des partenariats public-privé solides.

L’année 2024 a été marquée par une performance économique encourageante pour la RDC. Les recettes intérieures ont progressé de 27 % en francs congolais (CDF) et de 19 % en dollars américains (USD), totalisant 25.188,6 milliards de CDF. Cette hausse reflète une meilleure mobilisation des ressources fiscales et un contexte régional plus favorable grâce à la ZLECAF. Toutefois, malgré ces avancées, la RDC doit surmonter des défis structurels majeurs :

Il y a tout d’abord le faible taux d’industrialisation qui limite la capacité à transformer localement les matières premières.

Ensuite, les infrastructures inadéquates dans les secteurs du transport, de l’énergie et de la logistique, qui augmentent les coûts et freinent la compétitivité.

Sans oublier une dépendance aux exportations de matières premières non transformées, qui expose l’économie aux fluctuations des marchés internationaux.

La Banque mondiale a souligné que malgré une croissance du PIB de 6,5 % en 2024, soutenue par des activités minières dynamiques, notamment dans l’exploitation du cuivre et du cobalt, environ 72,9 % de la population vit toujours sous le seuil de pauvreté. Cette situation est attribuée à la forte dépendance du pays au secteur extractif, au manque d’infrastructures, à la faiblesse des institutions et à un taux de fécondité élevé qui limite la progression du revenu par habitant et la réduction de la pauvreté. 

Le gouvernement congolais a déjà défini plusieurs axes pour relever ces défis, notamment le renforcement du secteur industriel à travers des investissements ciblés dans les infrastructures (zones industrielles, routes, énergie), la formation professionnelle et le soutien aux petites et moyennes entreprises (PME) et la promotion de la conformité entre autres. 

L’adhésion de la RDC à la ZLECAF représente un véritable tournant économique, offrant au pays un accès élargi à un marché continental de 1,5 milliard de consommateurs. Cette intégration ouvre la voie à une diversification des exportations et à une montée en gamme des produits congolais grâce à la transformation locale des ressources naturelles, notamment dans les secteurs stratégiques du cobalt, du cacao et de l’agro-industrie. Toutefois, pour traduire ce potentiel en croissance durable, il est impératif que la RDC améliore significativement son tissu industriel, renforce ses infrastructures et assure la qualité et la compétitivité de ses produits sur le marché africain.

Par ailleurs, la réussite économique de cette intégration repose sur la mobilisation efficace des ressources, la stabilité macroéconomique et un environnement favorable aux investissements, en particulier pour les petites et moyennes entreprises. Comme le souligne la Banque africaine de développement, « le succès de la ZLECAF dépendra largement de la capacité des pays à accompagner leurs économies par des politiques industrielles cohérentes et inclusives ». La RDC est à un moment clé de son développement : si elle parvient à relever ces défis, elle pourra non seulement dynamiser son économie, mais aussi contribuer significativement à la croissance économique régionale et continentale.

Don Momat

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