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L’Afrique compte une riche diversité biologique qui fait du continent noir un maillon essentiel dans la recherche de l’équilibre de l’écosystème. Au moment où le monde se donne rendez-vous à Cali, en Colombie à la 16 ème covention des Nations Unies sur la diversité biologique (CDB) qui se tiendra du 21 octobre au 1er Novembre, l’Afrique se tient prête à unir ses forces afin d’évaluer les engagements pris par des pays par le passé et ainsi définir l’avenir ensemble. Au bout du compte, il s’agit de ne plus rester à la traîne et ainsi faire valoir le côté solution que portent les pays du continent noir. Géopolis Hebdo a interrogé Charly Facheux à ce sujet. Le vice-président d’African Wildlife foundation se félicite des avancées que l’Afrique a enregistrées en terme d’efforts à converger ses vues face « aux autres ». Un grand pas a été franchi. « L’Afrique a changé d’approche également, nous ne partons plus à ce genre de discussion comme des demandeurs et c’est ça qui est assez important », a déclaré Charly Facheux.

Interview

Géopoliss Hebdo : Quel est le principal but de ce grand forum à venir ?

Charly Facheux : Déjà je vous remercie pour l’intérêt que vous portez sur questions environnementales. Je pense qu’il est plus en plus important que la presse et les journalistes s’y intéressent. Le futur de la planète en dépend fortement.


Et vous avez raison, la Convention sur la biodiversité, la 16 ème se tiendra en Colombie et l’un des thèmes importants, évidemment, c’est la paix avec la nature et ça c’est important. Vous vous rendez compte qu’il y a 2 ans à peu près, on a eu une convention au Canada, qui avait mis les bases en effectivement d’un cadre conceptuel. Donc la Convention qui se tiendra en Colombie sera l’opportunité importante d’évaluer les avancées au niveau de ce cadre-là ; de voir un peu le progrès au niveau des 23 cibles qui avaient été identifiées au niveau de ce cadre conceptuel ; de discuter sur les modalités de financement et d’attribution de ces financements. Et ça, c’est assez important ; de promouvoir effectivement l’intégration des communautés minoritaires, principalement, les peuples autochtones, les femmes et les jeunes. Et de voir fait comment on peut rendre cela institutionnel. Je pense que c’est une étape assez importante dans la mise en place de ce cadre conceptuel.

GH: L’Afrique représente une très riche diversité biologique, végétale et animale, mais on a aussi l’impression que l’Afrique est souvent l’oubliée de ce genre de grandes rencontres. Est-ce que les pays africains sont invités individuellement où est ce que l’Afrique parlera d’une même voix ? Comment cela va se passer ?

Charly Facheux : Les pays sont membres de façon individuelle, ça c’est important. Mais maintenant, depuis un certain temps, il y a un très bon mouvement même au niveau de la convention changement climatique, dans la nécessité d’avoir une harmonisation de points de vue, et à cet effet, l’Afrique a commencé à avoir un groupe qu’on appelle le groupe des négociateurs qui se mettent en place et qui discutent des thématiques importantes pour avoir des points de vue communs. Et AWF depuis un certain temps, avec d’autres partenaires, on a contribué à mettre en place et à renforcer ce groupe-là. Vous vous rendez compte également qu’il y a à peu près 2 ans, lors de la Convention du du travail qu’on a fait sur les aires protégées, l’idée était toujours de pouvoir avoir des positions communes. On sent évidemment, il est clair que ce sera toujours pas le cas, mais ce qui est important, c’est de se rendre compte que l’Afrique a traversé la période où elle se rend compte que, on est plus fort ensemble, on va plus loin ensemble et c’est maintenant pour nous quelque chose qui est assez intéressant.
J’ai le l’avantage et l’opportunité d’être témoin de plusieurs COP (conférence de l’ONU sur le climat) et je peux vous dire que de plus en plus, l’Afrique fait l’effort de parler d’une seule voix.

GH : Vous dites aussi qu’il y a un groupe qui fait le plaidoyer au nom de l’Afrique, mais comment le continent africain doit-il s’y prendre pour avoir les avantages techniques et financiers afin de mieux protéger sa diversité biologique ?

Charly Facheux : Je pense que la question de l’attribution des financements est assez importante, et c’est même très souvent le cœur des débats, parce qu’il faut être honnête et je pense que l’Afrique, en parlant d’une seule voix devient une force assez importante.
L’Afrique a maintenant clairement déterminé les moyens dont elle a besoin pour mettre en place sa politique. Un des éléments qui était très souvent mis au passif de l’Afrique, c’était l’absence d’une évaluation claire de nos besoins en terme d’implémentation des stratégies nationales. Cela n’est plus le cas. Je pense que les pays africains ont fait ce travail énorme de développer des stratégies nationales et de les évaluer.
Maintenant, le problème, c’est de mettre en place les stratégies pour attirer le maximum des ressources. J’ai dit également que l’Afrique a changé d’approche également, nous ne partons plus à ce genre de discussion comme des demandeurs et c’est ça qui est assez important. Je pense que l’Afrique se doit de se positionner en un ayant-droit naturel, compte tenu de la base, en termes de nature que nous avons et effectivement, il est important pour l’Afrique de se comporter comme un ayant-droit, mais c’est qui est vraiment important, c’est que l’Afrique doit pouvoir démontrer sa capacité à gérer les financements si elles arrivent. Ça, c’est une question qui a souvent été est posée et je pense qu’il est important de démontrer également qu’on a aussi mis en place des mécanismes non seulement de pouvoir recevoir, mais de pouvoir les gérer de façon claire et optimale. Et surtout de faire en sorte que les bénéficiaires finaux, qui sont les communautés, reçoivent les financements parce qu’en fait, ces financements doivent aller au niveau des bénéficiaires.

GH : Selon nos informations, il est attendu qu’au moins 30 milliards de dollars américains soient mobilisés d’ici 2030 pour des activités en faveur de la biodiversité. De manière plus précise, à quoi serviraient ces sommes ? Est-ce qu’il y a une clé de répartition parce que la crainte c’est que les pays africains s’en sortent avec un strict minimum, comme d’habitude.

Charly Facheux: Oui, évidemment. A ce jour, il n’y a pas de clés de répartition et je pense que tout dépendra des négociations et des forces en présence. Mais je n’aime pas tout le mot force en présence. J’aime dire tout dépendra des éléments qui sont mis sur la table et des éléments clairs et justes. L’Afrique a compris cela et a commencé à développer les stratégies nationales. Ça c’est la première chose et c’est ce qui est important. Mais maintenant, cette stratégie ne doit pas être seulement des stratégies théoriques, il faut qu’elle soit basée sur des faits clairs et précis. On a très souvent oublié l’importance des communautés locales, de la culture de nos us et coutumes.
On a très souvent oublié certains éléments qui rentrent dans la valorisation de cette stratégie-là et je pense qu’en le faisant de façon systématique et professionnelle, on aura très certainement des besoins ou des valuations qui sont beaucoup plus conséquentes. Ce qui est également important, c’est de savoir que la clé de répartition va également dépendre de comment les montants doivent être utilisés. Comment est-ce que le partage d’expérience peut être élaboré ? Quelle est la contribution, même propre, des pays africains dans ce dans ce processus ? Donc je pense que nous avons-là et c’est ce qui est important, toutes les clés pour faire en sorte que les éléments que nous mettons sur la table soit assez forts et conséquents. Je pense que et je vais copier un peu la résonance qu’utilise le Congo : l’Afrique a la solution ; l’Afrique doit pouvoir implémenter cette solution-là et l’Afrique doit pouvoir faire en sorte que la solution qui est proposée soit suivie par les autres.

GH: L’Afrique perd parfois sa diversité biologique, espèce végétale ou animale, parce que cela représente, une source de financement importante. D’abord, je veux savoir quelles alternatives techniques et financières un forum, comme la Convention sur la diversité biologique propose pour permettre de conserver la biodiversité qui est parfois en péril ? Et puis, comment est-ce que les recommandations de cette convention peuvent-elles parvenir aux communautés qui sont en contact direct avec la diversité biologique ?

Charly Facheux : Merci, ça, c’est une question qui m’est très chère parce que je pense que l’Afrique a très longtemps mis de côté son principal input, qui est le savoir-faire naturel, le savoir-faire de nos peuples, l’héritage que nous avons reçu.
Je pense que pour moi, c’est la première alternative, c’est de retourner aux sources et d’utiliser ce savoir naturel. Pendant longtemps ces communautés ont préservé la forêt, ont préservé les ressources avec une perte minimale. Maintenant, je pense que si on ajoute à cela les nouvelles connaissances, le partage d’expérience, l’accès à l’information et le développement des innovations locales, je pense, c’est à ce niveau donné, les jeunes africains principalement, et c’est là où je veux les mettre au défi, Ils ont développé une aptitude à être innovant. Il est important que les innovations, les technologies innovantes soient également au service de cette de la biodiversité.
Comment faire en sorte que nos jeunes mettent tout le savoir-faire à contribution pour qu’on puisse diminuer la vitesse de perte, parce que le problème, c’est que la vitesse est assez importante qu’il faudrait la diminuer. Et effectivement, après un certain temps espérer renverser la tendance. Et à ce niveau-là, je pense que nous avons également besoin d’un outil important qui est la presse, les médias, la communication, pour partager l’information et pour moi cette interview est très importante parce que les médias commencent à s’ouvrir et à comprendre la nécessité de la survie du monde.
On ne peut plus le faire sans pouvoir partager les informations. Comment allons-nous faire en sorte que les résultats et les résolutions puissent parvenir jusqu’au dernier bénéficiaire, avec les moyens et le langage qui permettent qu’il puisse comprendre. Comment faisons-nous pour que leurs us et coutumes puissent s’arrimer aux nouvelles méthodes, aux nouvelles propositions, comment connecter les peuples autochtones avec ceux des autres pays, des autres continents. Je pense d’ailleurs que c’est même beaucoup moins financement. C’est beaucoup plus inter-échanges, inter-culture que cette possibilité peut devenir une réalité. Et comme je dis également, je veux insister sur le rôle des médias, c’est primordial et nous voulons et nous espérons que les médias seront également assez présents lors de ce forum, ou au moins nous aiderons à socialiser les résultats de la COP.

Propos recueillis par Patrick Ilunga

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