Quand je revois Kolwezi la ville de ma naissance, je suis toujours ému et inquiet car la mémoire fait venir des souvenirs intenses de notre enfance, mais la réalité est toute autre car Kolwezi s’est transformée en deux décennies en une vrai mégalopole avec des nouveaux quartiers, des nouvelles cités qui se construisent au rythme des activités minières. À l’époque tout tournait autour de la Gecamines. Elle etait le poumon de la ville et tout s’articulait autour d’elle. Des cités minières étaient liées aux opérations précises. Ainsi la cité de Luilu s’est développé autour de l’usine de raffinage par électrolyse, la cité de Kapata surplombait la mine souterraine de Kamoto, la cité Musonoie abritait la mine a ciel ouvert de Dikulwe, la cité Gécamines-Kolwezi avait les ateliers ouest, le concentrateur.
Voilà les souvenirs de mon enfance désormais envolés car d’autres réalités se sont invités à la table du développement. Kolwezi c’est au moins 22 entreprises minières dans la filière cuivre cobalt. Ce sont des dizaines d’unités de traitement éparpillées dans les zones autrefois vides. L’urbanisation va progressivement pour atteindre le lac Lualaba qui se trouve à plus de trente kilomètres de la poste de la ville. Partout ce sont des nouvelles maisons et une fièvre comme à l’époque de la ruée vers l’or. On sent que les choses bougent et comme toutes les villes qui ont un focus sur les moyens, les gens sont pressés, ils ne prennent plus le temps de se parler, ni de se connaître avant de conclure des affaires. Au rythme effréné des camions qui sortent des mines, les intermédiaires ne peuvent se payer le luxe de discuter, alors ils achètent au prix élevé.
Kolwezi est parmi les villes les plus chères de la République. Le loyer y est prohibitif et les biens de première nécessité coûtent plus cher qu à Lubumbashi. C’est le retour en force de spéculateurs car les informations intéressantes sont retenues par des commissionnaires qui sont partout et pour tout.
Ville aux charmes multiples, son développement est à l’image des ambitions mondiales qui pèsent sur la République démocratique du Congo. La tragédie est que les lieux historiques qui ont enfanté des souvenirs importants pour des dizaines de générations ont pratiquement disparu. À l’exemple de l’église de Mariapolis, haut lieu de la spiritualité catholique est devenu un chantier pour l’erection d une nouvelle bâtisse. La cité Gécamines-Kolwezi est devenue une carrière et personne ne peut y fouler les pieds car les maisons sont devenues des remblais. C’est une ville autre qui sort des pioches et qui sera tout sauf la ville de Kolwezi de vos souvenirs. D’ailleurs chose etonnante tout le monde parle lingala comme une forme de mot de passe en disant qu’autres temps, autres mœurs. C est toujours Kolwezi, mais ce n’est plus Kolwezi de mon enfance.
