La procédure judiciaire visant à lever l’immunité de Joseph Kabila, ancien président de la RDC, marque un tournant historique dans un pays où l’impunité des élites a longtemps été la norme. Cette démarche, initiée par la justice militaire congolaise, pourrait redéfinir les équilibres politiques, sécuritaires et judiciaires du pays.

Les ramifications de cette décision nécessitent, en s’appuyant sur les récentes évolutions, une analyse particulière. En cause, les accusations : trahison, crimes de guerre et implication avec le RDF/M23 sont trop lourdes pour l’ancien Président de la RDC. Joseph Kabila, sénateur à vie depuis la fin de son mandat en 2018, est accusé par les autorités congolaises qui sollicitent sa levée d’immunité pour être inculpé.

Il aurait trahi la nation par son soutien présumé à l’Alliance Fleuve Congo (AFC), branche politique du mouvement rebelle RDF/M23, un instrument militaire rwandais dans l’Est du pays. Crimes de guerre et crimes contre l’humanité, liés aux massacres de civils dans les régions du Nord et Sud-Kivu et participation à un mouvement insurrectionnel, en coordination avec le Rwanda.

Le ministre de la Justice, Constant Mutamba (un ancien Kabiliste), affirme détenir des « preuves tangibles et irréfragables » de son implication, bien que Joseph Kabila et son parti, le PPRD, dénoncent une machination politique. Cette procédure judiciaire est un précédent historique qui va créer une jurisprudence avec le rôle clé que devra jouer le Sénat dirigé par Sama Lukonde (un autre ancien Kabiliste).

Joseph Kabila bénéficie d’une immunité parlementaire en tant que sénateur à vie. La levée requiert un vote du Sénat, dominé par la majorité présidentielle de Félix Tshisekedi, ce qui rend son approbation probable. Si l’immunité est levée, la justice pourra engager des poursuites pénales pour trahison et crimes internationaux et saisir ses biens, y compris ceux à l’étranger. C’est un test pour l’État de droit.

Cette procédure est sans précédent en RDC : aucun ex-président n’a été jugé pour des crimes de cette gravité. Elle pourrait renforcer la crédibilité judiciaire ou être perçue comme une chasse aux sorcières politique. Les implications géopolitiques et sécuritaires de cette procédure pourraient embraser la crise dans l’Est de la RDC et éclairer dans une certaine mesure le rôle de Paul Kagame et du Rwanda.

Le RDF/M23 contrôle des territoires clés (dont Goma et Bukavu). Joseph Kabila est accusé d’y avoir séjourné, ce que son entourage dément. Une levée d’immunité pourrait durcir les tensions avec le Rwanda, malgré des négociations en cours. Fragiliser les pourparlers de paix, si Joseph Kabila est perçu comme un intermédiaire incontournable. Ce qui pourrait un risque d’instabilité politique.

Le PPRD, suspendu, pourrait mobiliser ses partisans, exacerbant les clivages. Félix Tshisekedi joue un pari risqué. S’il échoue à faire condamner Joseph Kabila, il pourrait apparaître affaibli. Plusieurs scénarios possibles s’offrent à la RDC pour l’avenir immédiat. S’il y a levée d’immunité et poursuites, Joseph Kabila serait contraint à un exil définitif ou à un procès symbolique (son retour en RDC semble improbable).

Il y aurait alors saisie de ses actifs, affaiblissant son réseau économique. S’il y a blocage au Sénat ou arrangement politique. Une médiation internationale pourrait intervenir pour éviter une escalade. Il pourrait aussi avoir une explosion des violences. Si ses partisans réagissent par des protestations ou des alliances avec le RDF/M23. Ce serait alors un tournant pour la RDC.

Cette affaire dépasse la simple personne de Joseph Kabila. Elle teste la capacité de la RDC à juger ses anciens dirigeants et à rompre avec l’impunité. Mais elle révèle aussi les luttes de pouvoir qui minent le pays. Entre justice et realpolitik, le choix de Félix Tshisekedi pourrait stabiliser la RDC ou l’embraser. L’histoire jugera si cette procédure est un acte de courage judiciaire ou un règlement de comptes masqué.

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