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Il y a de ces rencontres qui vous changent de fond en comble, car elles viennent bousculer des certitudes établies et vous obligent à reconsidérer les piliers même de vos analyses. Il est établi que l’Europe conquérante a eu un effet contrasté sur l’Afrique et a depuis toujours formaté les africains au point qu’ils ont choisi de vivre selon le modèle de vie venu de l’Occident. Nous avons appris les langues des colons pour en faire les nôtres, mieux des langues officielles, et nous avons adopté les us et coutumes caucasiens, voire nous sommes défenseurs acharnés des religions venues dans les bateaux des oppresseurs. Tout cela, nous le savons, car depuis plus d’un siècle l’Europe est perçue comme une sorte d’eldorado pour des millions d’Africains qui sont prêts à l’impossible pour arriver dans l’espace Schengen.

Mais ce que nous n’avons pas assez remarqué, c’est l’effet que l’Afrique a eu sur l’Europe, sur certains européens qui ont été impactés par la magie de l’Afrique, qui se sont laissés pénétrés par les valeurs africaines. Ils sont aussi des millions qui ont été bouleversés au contact de la mère Afrique. Ils y ont travaillé pour beaucoup, ils ont appris à aimer l’Afrique, à s’inspirer de l’Afrique. Certains ont même décidé, loin de l’œuvre de la colonisation, de vivre en Afrique, de se marier aux africaines, de prendre le combat du développement de ce continent et parfois même, de penser compenser, par leur engagement personnel, les injustices graves subies par les africains dans cette œuvre de destruction massive que l’on a appelée  » œuvre de civilisation  ».

Ils sont revenus en Europe pour certains, mais ont le cœur vrillé à l’Afrique, ils sont nombreux ceux qui se sont portés volontaires pour être même des consuls honoraires des certains pays africains.


C’est vers ces européens d’Afrique que nos pas de reporter se sont dirigés et qu’une rencontre fortuite a révélé la grande richesse de ces personnalités à la peau caucasienne mais dont l’âme porte la noblesse africaine.

Marseille, ville portuaire, deuxième agglomération française, été 2024, le soleil baigne la cité phocéenne et les touristes se pressent de venir au chaud et cherchent à bronzer. Par les annonces sur plusieurs sites, nous voilà en discussion avec une maison d’hôtes au nom exotique de Casa Cacao située tout prêt de la plage et du Vélodrome, temple de football de la team bleu ciel et blanc. Le nom nous plaît et la publicité qui lui est faite est élogieuse et évoque cette Afrique des victoires, car le cacao, cet or vert dont la Côte d’Ivoire – une ancienne colonie de l’Afrique occidentale française – en est le premier producteur mondial, est au cœur de l’économie mondiale. Nous sommes devant une belle villa pour prendre nos quartiers, le lieu est cossu, dans un environnement de prestige proche de la plage Prado.

Le monsieur qui nous reçoit est un homme d’un certain âge, aux cheveux blancs comme de la neige. Sourire franc et regard brillant de douceur et d’amabilité. On voit qu’il ne porte pas sur nous ce regard parfois condescendant qui traine chez certains européens pour vous rappeler quelle place vous occuper dans la chaîne alimentaire. Lui, il est aimable, courtois et vraiment accueillant. Nous nous approchons de la Casa Cacao et à notre grande surprise, le bâtiment arbore un drapeau sur son flanc, le drapeau d’un pays d’Afrique, le Sao Tomé-et-Principe, une ancienne colonie du Portugal, indépendante depuis 1975, et dont la langue officielle est le portugais.

Face à notre étonnement, notre hôte nous déclare qu’en effet, nous sommes au consulat de ce pays d’Afrique et lui en est le Consul honoraire. Je venais de rencontrer ces européens d’Afrique, ceux qui ont gardé de leur passage sur le continent un amour profond et se sentent redevables des valeurs puisées de ces merveilleux vécus africains. Le consul est un homme à la retraite qui a travaillé dans le secteur touristique dans plusieurs pays d’Afrique, qui a vendu des destinations et qui a ouvert les voies vers cette Afrique de progrès, celle que l’on se doit de découvrir et d’aimer.

Revenu en Europe tout en gardant des attaches avec le continent, il a décidé de porter sur lui la responsabilité de parler et de représenter un pays d’Afrique et ce bénévolement comme Consul honoraire. Cela peut vous paraître simple et pourtant, loin au-delà, surtout dans cette Europe où les  » Extrêmes Droites  » reviennent au pouvoir et des sentiments xénophobes et racistes sont des projets de société pour certains partis, porter l’Afrique c’est affirmer l’universalité de la culture humaine, c’est confirmer l’unité de la race humaine au moment où des thèses reviennent à la surface pour justifier des politiques d’extermination des africains, juges des peuples qui mettent en danger l’humanité par leur fécondité exponentielle.

Avec des théories des complots qui voudraient que des forces obscures dans la maffia mondiale se soient données le droit d’équilibrer la population mondiale confrontée à une démographie de plus en plus galopante face à des ressources limitées. Accepter de dire que l’Afrique n’est pas ce continent méprisé mais c’est une source d’enchantement pour une humanité en perte de repères. Cette Afrique de grandes victoires, l’Afrique des sciences et des lettres, cette Afrique dont la culture est un matelas pour les civilisations agitées, cette Afrique des poètes, des épopées, des contes et des prouesses. Accepter de représenter dans l’hexagone cette Afrique, c’est construire des ponts avec un avenir différent des fantasmes cultivés (actuellement) par un Afro pessimisme sans nom.

Monsieur Jean-Pierre Bensaid, ci-devant Consul honoraire de Sao Tomé et Principe à Marseille, et son épouse sont engagés dans cette activité de promouvoir sur le continent au travers des ONGD des activités de lutte contre des fléaux qui endeuillent encore l’Afrique. L’argent qu’ils gagnent avec la Casa Cacao sert aussi à financer des vraies opérations de solidarité. Ils le font sans crier dans les médias, sans en parler même sur leur site. Il a fallu notre indiscrétion de journaliste économique et d’investigation pour pouvoir tirer le lien entre leur activité à Marseille et leur engagement à Sao Tomé-et-Principe.

Ils sont nombreux les amis de l’Afrique, ils sont parfois choqués de voir des africains douter d’eux-mêmes, trahir leur histoire, se couper de leur mémoire collective et s’engager dans une culture d’emprunt qui se révèle en fin de compte inopérante. Eux, ils sont européens, ils ont appris à aimer l’Afrique sans renier leur identité, ils assument leur authentique humanité mais sont conscients des richesses immenses que le continent donne à l’humanité. Ils savent que sans échange libre et consensuel, les deux mondes vont évoluer en parallèle avec des stéréotypes et des explosions régulières dues au choc des cultures mal assumées.

Adam Mwena Meji

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