Le Premier Président Jimmy Munganga dégaine

A l’occasion de la publication du nouveau rapport d’audit de la Cour des comptes sur les recettes judiciaires, les deniers publics ont été ausculté à l’aune de la lutte contre les fautes de gestion et le détournement. Lancé depuis l’année dernière, cet audit a concerné les cours, tribunaux et parquets y attachés, la Police Nationale Congolaise (PNC) ainsi que certains services d’assiette relevant du Ministère de la Justice et Garde de sceaux, soit 43 entités au total dans la ville province de Kinshasa. Les auteurs du rapport déplorent la faible mobilisation de ces recettes et Jimmy Munganga, Premier Président de la Cour, juge la situation préoccupante dans son exposé lu lors d’un point de presse qu’il a animé, du lundi 20 mai dernier, dans la salle d’audiences Léon Kengo Wa Dondo.

Face aux assignations budgétaires à atteindre pour renflouer les caisses de l’Etat, la mobilisation des recettes judiciaires demeure faible. La quotité versée dans le trésor public est dérisoire et la République Démocratique du Congo vit à perte. La Cour des Comptes rend donc publique une nouvelle fois un rapport d’audit sévère sur la gestion des revenus, provenant du secteur judiciaire encadrés par la Direction Générale des Recettes Administratives, Domaniales, Judiciaires et de Participation (DGRAD).

Selon ce rapport d’audit, le contrôle par la Cour des comptes de l’exécution des lois de finances a révélé que la part de ces recettes est dérisoire. Par rapport aux recettes hors pétroliers producteurs encadrées par la DGRAD, cette part n’a été que de 3,88 % en 2019, 3,59 % en 2020, 1,76 % en 2021 et de 1,58 en 2022. Cette faible mobilisation a donc interpellé la Cour des comptes dont la mission consiste aussi en matières publiques à s’assurer de leur mobilisation optimale.

Les recommandations pour y mettre fin

La situation constatée sur terrain dans le cadre de cet audit est malheureusement déplorable tant au niveau des Cours, tribunaux et parquets y attachés qu’au niveau des services d’assiette du ministère de la justice et la Police Nationale Congolaise (PNC). Face à une telle situation, la Cour des comptes formule des recommandations dont la tenue d’une rencontre au sommet entre le Président du Conseil Supérieur de la Magistrature, le Ministre en charge de la justice, le ministre des finances, le Commissaire Général de la PNC et le Premier Président de la Cour des comptes en vue de mettre en place des dispositifs efficaces pour une mobilisation accrue des recettes.
La révision à la hausse des minimas et des maximas des fourchettes des taux des amendes transactionnelles et des frais contenus dans les arrêtés interministériels, la suppression de la fonction de Greffier comptable, l’affichage public des taux d’actes générateurs au niveau de tous les services d’assiette, la motivation du personnel des services d’assiette par le paiement de la prime de rétrocession aux services et non aux, telles sont les autres recommandations formulées par la Cour.

Quelques faits constatés lors de l’audit

Au niveau des Cours, tribunaux et parquets, la Cour a constaté la méconnaissance de la part des animateurs des juridictions et offices, du statut de leurs entités comme service d’assiette, la perception des mains des requérants ainsi que la détention des frais de justice par des personnes non habilitées pour les renverser plus tard auprès des intervenants financiers. L’absentéisme des ordonnateurs de la DGRAD dans bon nombre des services d’assiette. Également, justification du paiement des frais de justice par des faux bordereaux de versement émis à partir de nombreux comptes non reconnus par l’intermédiaire financier qu’est la Rawbank.

Au niveau des services d’assiette du Ministère de la Justice, les faits constatés sont déplorables. L’ on peut noter le paiement de la prime de rétrocession dans les comptes bancaires individuels d’une vingtaine de cadres et agents en lieu et place de la Coordination Nationale de la Police Judiciaire et l’enregistrement en comptabilité du montant de 10 dollars américains pour l’obtention de l’extrait du Casier judiciaire alors que les requérants paient 30 dollars américains ou plus entre les préposés de cette entité.

Au niveau de la PNC, l’audit a conduit aux constatations telles que la consommation à la source d’une importante partie des recettes réalisées au motif que le gouvernement ne verse pas les frais de fonctionnement, le versement par Monsieur Emmanuel Manya Vita, comptable public subordonné au Commissariat Urbain du District de Ilunga des recettes réalisées dans un compte bancaire ouvert en son nom à la TMB et l’application systématique par les officiers de police judiciaire du taux de minimum de 20 dollars américains fixés dans l’annexe de l’article interministériel No 001/CAB/MIN/INTERSECDAC/2012 et No CAB/MINFINANCES/2012/535 du 22 août 2012.

Du reste, la Cour des comptes envisage d’abord la poursuite devant la Chambre de discipline budgétaire financière de tous les auteurs de fautes de gestion relevées, ensuite la transmission aux cours et tribunaux de l’ordre judiciaire des dossiers des infractions pénales relevées, notamment les cas des détournements des deniers publics et des faux et usages de faux, et enfin le lancement d’une mission d’audit sur les recettes judiciaires en provinces.

Djodjo Mulamba

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