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Les réponses de l’Inspecteur Général des Finances – Chef de Service ont produit un tollé tant ils étaient donnés dans un contexte qui pouvait prêter au malentendu. Technicien des Finances publiques, il se devait de dire les choses telles qu’elles soient perçues de manière exacte aussi bien par les experts que par la grande masse. A la question de savoir pourquoi, il ne s’occupait pas des dépassements budgétaires, Monsieur Jules Alingete a déclaré que le dépassement budgétaire n’était pas un acte de détournement, ni un acte de mauvaise gestion. Si plusieurs personnes ont compris en quoi cela n’était pas un détournement, il restait de savoir de quelle manière ceci n’était pas un acte de mauvaise gestion. Plusieurs experts en Finances Publiques se sont demandés comment le numéro 1 de l’Inspection Générale des Finances (IGF) pouvait affirmer cela ? Pour en avoir le cœur net, la rédaction de Geopolis Hebdo a décidé d’approfondir le sujet en interrogeant les textes et les personnes à même de produire sur le thème des faits irréfutables. Jules Alingete a ouvert un vrai sujet de recherche et ce sujet fait appel à l’intelligence pointue sur les Finances Publiques. L’effort en valait la peine de consulter les textes et de comprendre les tenants et les aboutissants des dispositions en la matière.

En effet, en lisant attentivement la Loi nº 11-011 du 13 juillet 2011 relative aux Finances Publiques, on découvre le chapitre relatif au régime des sanctions. Celui-ci stipule que les Ordonnateurs sont responsables des certifications qu’ils délivrent. Les membres du Gouvernement encourent, en raison de l’exercice de leurs fonctions, les sanctions prévues par la Constitution et les Lois de la République. Ils sont également responsables des résultats atteints par rapport aux objectifs attachés au budget de programme établi et exécuté sous leur autorité.

A l’article 129 de cette même Loi, on découvre la panoplie des sanctions et surtout, une allusion nette à ce qui peut paraître comme un dépassement budgétaire. L’article susmentionné stipule notamment qu’il est passible d’une sanction pour faute de gestion au niveau du pouvoir central toute personne qui n’aurait pas respecté les règles d’engagement des dépenses, qui aurait engagé des dépenses sans en avoir le pouvoir ou reçu délégation, qui aurait engagé des dépenses sans disponibilité des crédits, qui aurait effectué une dissimulation de nature à permettre la fausse imputation d’une dépense, qui se serait procuré à lui-même ou à autrui un avantage injustifié, sous toute forme, entraînant un préjudice pour le pouvoir central, qui aurait omis en méconnaissance de la Loi fiscale de remplir les obligations qu’elle impose aux fins d’avantager indument les contribuables, qui auraient enfreint les règles relatives à l’exécution des recettes et des dépenses du pouvoir central ou de la gestion des biens appartenant au pouvoir central ou qui est chargé de la tutelle ou du contrôle des services du pouvoir central, et enfin, qui aurait donné son approbation aux décisions incriminées.

S’agissant du sujet de notre démarche, on peut comprendre, en lisant l’alinéa 3, que le dépassement budgétaire est celui qui consiste à engager des dépenses sans crédits disponibles. On peut dire que tout dépassement constaté est passible de cette sanction qui va de la sanction administrative, de l’action disciplinaire, voire même de la poursuite pénale. Mais à quel moment constate-t-on le dépassement ?

C’est ici l’intelligence des Finances Publiques pour découvrir que seule la Cour des comptes est à même de déterminer s’il y a dépassement budgétaire à la clôture des comptes et au moment de la réduction des comptes. On peut dire sans se tromper que c’est une opération annuelle, car portant sur un exercice comptable. Le dépassement budgétaire serait donc constaté par la Cour des comptes à la clôture de l’exercice et si la Cour des comptes veut la correction de ces écarts, elle va s’adresser au Gouvernement de la République pour que celui-ci puisse présenter à l’autorité budgétaire un collectif budgétaire de correction.

C’est fût notre joie de découvrir, par exemple pour l’exercice 2020, que la Loi portant reddition des comptes de la Loi de Finances pour l’exercice 2019 a été suivie d’une autre Loi de Finances rectificative présentée le 24 décembre 2020 pour l’exercice 2020. Cette action du Gouvernement des warriors a permis d’harmoniser les comptes de l’État en dépenses et en recettes et de régler la question du dépassement.

Mais il faut aller plus loin, car la Loi que nous avons évoquée en début, celle de 2011, en son article 234, indique que :  » Sans préjudice des dispositions de l’article 232 ci-dessus, la présente Loi entre en vigueur dans l’intégralité de ses dispositions, au premier janvier de la huitième année suivant celle de sa promulgation, date à laquelle toutes dispositions contraires seront abrogées  ».

Qu’est-ce que cela veut dire ? La LOFIP a fonctionné avec des dispositions non actives, car le système général de fonctionnement relatif au budget de l’État était lui aussi en mutation. Cette Loi a été écrite avec l’idée que le pays puisse adopter la procédure de l’élaboration d’un Budget-programme. Celui-ci devant se constituer par une décentralisation du pouvoir d’engagement, de liquidation et de paiement.

Aujourd’hui, les Ministres signent les bons d’engagements qui sont liquidés par le Ministère du Budget qui, lui, examine la disponibilité des budgets et le Ministère des Finances paie et la Banque Centrale du Congo (BCC) met à disposition les fonds nécessaires. C’est la fameuse chaîne de la dépense.

La réforme est en cours et l’on a appris que la date prévue pour ce changement majeur dans les Finances Publiques était 2019. Mais comme on l’a constaté, cette mesure a été reportée à quatre ans de plus, c’est-à-dire que c’est en 2023 que le Budget-programme sera d’application stricte et en ce moment-là, la sanction sur le dépassement budgétaire sera aussi applicable, car tout engagement sans crédit sera compris comme une faute.

Nous avons découvert dans notre investigation que cette confusion pouvait être à l’origine du malentendu, mais parler des dépassements budgétaires n’est possible qu’à la fin de l’exercice si le Gouvernement ne présente pas des Lois correctives et si le Parlement (Assemblée Nationale et Sénat) refuse aussi de corriger, alors le dépassement est consommé et soumis aux sanctions évoquées. Mais quels sont les facteurs qui favorisent l’avènement des dépassements ?

Selon des propos recueillis auprès de l’Administration des Finances Publiques et de l’Autorité Budgétaire, cette habitude vient essentiellement des dépenses en urgences qui ne passent pas par la procédure de liquidation. Ces dépenses en urgence sont le nerf faible de la (notre) vie nationale, car les différents évènements qui surviennent perturbent les plans de trésorerie et peinent à donner aux Finances Publiques une bonne image.

Adam Mwena Meji

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