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Un peu plus de deux mois après l’élection présidentielle, les législatives nationales et provinciales où il n’a pas été déclaré élu par la Commission Electorale Nationale Indépendante, l’ancien premier Ministre Samy Badibanga Ntita a su rebondir à la faveur de la sénatoriale du 15 mars dernier. Elu pour le compte du Kasaï Oriental, Badibanga s’est donné une belle carte à jouer. Désormais sénateur, le chef des « progressistes » se montre désormais très attentif au développement du Kasaï dont la précarité de la population semble devenue légendaire.

Pour les observateurs, Samy Badibanga Ntita est un battant. Après la déconvenue du 30 décembre dernier à l’issue de trois scrutins combinés (législatives nationales et provinciales ainsi que la présidentielle) où il a été déclaré perdant sur toute la ligne, l’ancien Chef du gouvernement semble avoir commencé à reprendre la main chaque jour qui passe. Selon le dernier rapport de l’organisation non gouvernementale (ONG) « Agir pour des Elections Transparentes et Apaisées » (AETA), et les avocats de ce dernier, le regroupement « Les Progressistes » aurait atteint le seuil électoral aux législatives nationales et provinciales contrairement à la décision de la Centrale Electorale. Si cela venait à être prouvé par les juges de la Cour Constitutionnelle, Samy Badibanga Ntita pourra donc recouvrer ses mandats tant au niveau national que provincial ajoutés à son siège de Sénateur. « Triple brassards », dirait-on dans le langage populaire. Quant à la coalition « Les Progressistes », AETA est convaincu que des « erreurs matérielles graves auraient été intentionnellement ou non commises dans les calculs des seuils de représentativité des élections législatives nationales et provinciales avec comme conséquence imminente de remettre en cause la quasi-totalité des résultats provisoires des dites élections proclamées par la CENI ». Selon le même rapport de l’ONG, « la divergence des listes des partis et regroupements politiques ainsi que des candidats indépendants ayant atteint le seuil de représentativité, lesquelles listes sont parfois caractérisées par des contradictions profondes sur le nombre total des voix obtenues alors que celles-ci sont toutes approuvées par la CENI. Quelques cas illustrent cette situation. Il s’agit du regroupement politique le Rassemblement des forces politiques et sociales de la RDC, Rassop et les Progressistes à qui il est attribué respectivement 2016.237 voix et 182.021 voix dans une première liste et 126.485 et 59.021 dans une seconde ».

AETA précise que pour l’élection des députés nationaux par exemple, « le nombre total de suffrage trouvé par la CENI est de 18.161.182 voix, alors que le calcul des voix enregistrées par l’ensemble des partis, regroupements politiques et indépendants repris sur la liste donne un chiffre exacte de 17.449.336 voix, soit un écart de 711.846 par rapport aux 18.161.182 voix considérées par la CENI. Cet écart constitue un surplus de voix apparemment inexplicable ».

La plateforme des ONG du secteur électoral ajoute encore en soulignant que « si l’on considère la seconde liste produite par la CENI, calcul fait, le nombre de suffrage valablement exprimé est de 17.236.484, soit un écart de 924.698 voix en surnombre inexplicable ».
Ces déclarations d’une source considérée comme étant la référence en la matière en RDC, chiffres à l’appui, risque de bouleverser le paysage politique du pays. Une hypothèse qui devra être confirmée ou infirmée par la haute Cour courant avril prochain.

Du côté de « Les Progressistes », l’on garde sa sérénité. Pas question de faire déjà la fête sans attendre les conclusions de la plus haute instance judiciaire du pays. Dans l’entretemps, nombre d’observateurs confient à Géopolis Hebdo que si la donne venait à être modifiée, « Les Progressistes », la plateforme de Samy Badibanga Ntita pourra devenir une force politique avec une véritable autonomie d’action pour avoir concouru à toutes les élections. Ce qui risque d’être un démenti cinglant pour ceux qui pensaient déjà enterrer l’ancien premier ministre, se basant sur les résultats pourtant provisoires de la CENI. Il ne serait pas excessif de certifier qu’on ne juge pas un homme politique sur la base d’une élection.

Aujourd’hui, ils sont plusieurs ces analystes qui parient sur l’inévitable rebondissement de Samy Badibanga Ntita. Un retour en force pour cet homme méthodique et discret, indispensable à la consolidation de son encrage d’homme politique de premier plan qu’il est.

L’on se souviendra de son entrée fracassante en politique active aux côtés d’Etienne Tshisekedi comme conseiller politique en 2009 avant d’être élu député national en 2011. Au sein du parlement, Samy Badibanga Ntina surprend quand il prend la tête du groupe parlementaire UDPS et Alliés en surclassant tous les grands noms familiers de l’espace politique congolais.
En 2016 après la conclusion du dialogue dit de la Cité de l’Union Africaine entre le pouvoir et l’opposition, c’est le même qui est nommé premier Ministre en remplacement d’Augustin Matata Ponyo, déjouant tous les pronostics.

De son court passage à la primature, l’on retiendra la relance du processus électoral. Sous son administration, a été relancée la recherche des ressources pour le financement des activités du processus électoral en hibernation depuis quelques mois.

Homme de contact, Badibanga a su fédérer autour de lui plusieurs courants politiques et créé le camp des Progressistes. Mais celui-ci a vite était confronté à la montée de deux autres blocs à l’issue de l’Accord politique du 31 décembre 2016 : d’un côté la Majorité Présidentielle (MP) qui sera plus tard, le Front Commun pour le Congo(FCC) dirigé par l’ancien Président Joseph Kabila en personne et le Rassemblement des Forces Politiques et Sociales Acquises au Changement piloté par l’opposant historique Etienne Tshisekedi, le père politique et biologique de l’actuel Chef de l’Etat Félix-Antoine Tshisekedi.

Si Joseph Kabila a su cimenté sa coalition en une force politique soudée, le Rassemblement d’Etienne Tshisekedi a vite coulé après la disparition de son géniteur, décédé le 01 février 2017 à Bruxelles de suite d’une embolie pulmonaire. Juste après la mort du « sphinx de Limete » (un autre surnom de Tshisekedi père), les ténors de sa coalition ont tenté sans succès de se choisir un successeur jusqu’à la scission du groupe juste avant l’installation du gouvernement dit d’union nationale issu de l’Accord de la Saint Sylvestre. L’unité affichée dans la foulée des élections de l’année dernière autour d’une candidature unique de l’opposition, du moins pour celle qui était à Genève, n’a pas survécu aux divisions internes au sein du groupe.
La naissance du Cach (Cap pour le Changement) et celle de Lamuka (réveillez-vous en lingala), nous la devons à ces divisions.

Face à cette confusion, il a été difficile pour « Les Progressistes » d’évoluer à découvert néanmoins, si la Cour Constitution lui donnait raison, alors le comeback sera puissant.
De sources proches de Samy Badibanga, l’homme serait déjà sur une feuille d’avenir en préparation des élections municipales, urbaines et locales.

José-Junior Owawa

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