Alors que le procès de l’ancien Premier ministre Augustin Matata Ponyo entre dans sa dernière ligne droite, la Cour constitutionnelle a officiellement répondu à la correspondance du président de l’Assemblée nationale qui contestait la poursuite du procès sans la levée préalable de l’immunité parlementaire du principal accusé, l’ancien premier ministre Matata Ponyo. Dans une lettre adressée au président de l’Assemblée nationale, le juge président de la Haute Cour Dieudonné Kamuleta a tranché : « l’intervention du pouvoir législatif à ce stade de la procédure est juridiquement infondée ».

Cette réponse cinglante intervient moins de deux semaines avant le verdict, qui est attendu pour le 14 mai. Tout semble désormais indiquer que la Cour ira jusqu’au bout, en dépit de l’absence remarquée de Matata Ponyo à la dernière audience du 23 avril. Ce jour-là, le ministère public avait requis une peine de 20 ans de travaux forcés à l’encontre de l’ex-chef du gouvernement, accusé de détournement de plus de 205 millions de dollars dans le dossier Bukanga-Lonzo.

Le président de l’Assemblée nationale, Vital Kamerhe, avait publiquement affirmé que la Cour ne pouvait entendre Augustin Matata, aujourd’hui député national, sans une autorisation formelle de l’Assemblée nationale, aucun acte de levée d’immunité n’ayant été transmis au bureau. Cette position avait été entérinée en plénière, et Matata avait utilisé cet argument pour justifier son absence à l’audience.

Mais pour Dieudonné Kamuleta, cette interprétation n’a pas lieu d’être. Dans sa lettre au président de l’Assemblée nationale, il souligne que l’article 157 alinéa 2 de la Constitution, souvent invoqué, s’applique uniquement à la phase d’instruction pré-juridictionnelle, et non à une affaire déjà enrôlée devant une juridiction de jugement. Autrement dit, la Cour ne se trouve plus dans une phase de poursuites, mais dans une phase solennelle où seules les règles du procès prévalent.

Le juge- président Kamuleta a rappelé que la Cour avait été saisie depuis 2022 et que Matata, ainsi que ses coaccusés, avaient déjà comparu à plusieurs reprises, soulevant diverses exceptions de procédure. Ces éléments, selon lui, seront analysés et tranchés dans l’arrêt final. « Il ne m’appartient pas, en tant que président, de me prononcer en dehors d’un arrêt de la Cour », a-t-il insisté, invoquant l’article 151 de la Constitution sur l’indépendance de la justice.

L’affaire Matata Ponyo, au-delà de son aspect judiciaire, est devenue un cas d’école sur la séparation des pouvoirs en RDC. Elle remet en question les relations entre Parlement, Gouvernement et pouvoir judiciaire, tout en testant les limites du régime d’immunité parlementaire. L’arrêt du 14 mai, quel qu’il soit, marquera un tournant, soit en réaffirmant l’autorité de la Cour sur les affaires en jugement, soit en relançant un débat sur l’interprétation des immunités dans un système parlementaire encore jeune.

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