L’Office national des transports (ONATRA) a franchi une nouvelle étape le mardi 03 septembre 2024, marquant la reprise du trafic ferroviaire entre Kinshasa et Matadi, interrompu depuis près de deux ans. Lors d’une cérémonie tenue à la gare centrale de Kinshasa, le Ministre du Portefeuille, Jean-Lucien Bussa Tongba accompagné de Martin Lukusa, Directeur Général de l’ONATRA, et de son équipe, a coupé le ruban symbolique, mettant en lumière le rôle essentiel de l’épine dorsale de l’économie du Kongo Central dans la relance du transport ferroviaire à l’Ouest du pays. Le premier train, chargé de 546 tonnes de charbon, a quitté Matadi pour Minkelo, où il a ensuite chargé 500 tonnes de ciment destinées à Kinshasa.
Ce succès logistique est le fruit de la réhabilitation complète de la voie ferrée par la Direction générale de l’ONATRA, démontrant ainsi la fiabilité et l’efficacité retrouvées du réseau ferroviaire.
Le Ministre du Portefeuille a salué cet accomplissement, félicitant la Direction générale de l’ONATRA pour sa gestion exemplaire. La réussite de ce projet est un témoignage des compétences techniques et managériales de l’ONATRA, qui continue de jouer un rôle stratégique dans le développement des infrastructures nationales.
Après la cérémonie à la gare, le Ministre s’est rendu au port fluvial de Kinshasa pour assister au départ du MB Luberu, un convoi fluvial en route vers Kisangani.
Cet événement lui a permis de rappeler les critères rigoureux de sélection des mandataires publics, fondés sur la compétence, l’intégrité, et la capacité à conduire des projets ambitieux. L’ONATRA incarne parfaitement ces valeurs, se positionnant comme un pilier essentiel du secteur des transports en République Démocratique du Congo (RDC).
»’ Sans chemin de fer, le Congo (Ndlr : Entendons tous par-là la République Démocratique du Congo) ne vaut pas un penny », conseillait le célèbre explorateur Henri Morton Stanley au Roi Léopold II. Ce conseil, plus d’un siècle après reste toujours d’actualité.
Chose promise, chose due, dit-on. » Dans exactement dix jours, soit le 20 août prochain ou au plus tard le 05 septembre, le trafic ferroviaire sur la ligne emblématique Kinshasa-Matadi reprendra officiellement », avait promis le management de cette importante entreprise du portefeuille de l’État. C’est désormais chose faite. La réouverture marque un tournant décisif pour mettre fin au calvaire des villageois vivant le long de ce trajet.
La ligne ferroviaire mythique reliant Kinshasa à Matadi, suspendue depuis des années a renoué avec son histoire, comme l’avait indiqué, le 30 juillet, Martin Lukusa, Directeur général de l’ex ONATRA, débaptisé pendant quelques années pour prendre le nom de SCTP, Société commerciale des transports et des ports, pour éviter la confusion de sigle d’avec l’autre SCPT (Société congolaise des postes et télécommunications) et pour redevenir encore ONATRA. Ce retour en force du chemin de fer, qui a marqué les annales de l’histoire congolaise, n’est pas simplement une réouverture de plus. Il s’agit d’une renaissance, d’une nouvelle ère pour le transport des biens et des personnes entre la capitale, Kinshasa, et la ville de Matadi, porte d’entrée économique Ouest de la RDC.
En fait, le lien ferroviaire entre Kinshasa et Matadi, long de 366 kilomètres (et qui prend 8 à 9 heures de trajet), a toujours joué un rôle crucial dans l’économie du pays. Depuis sa mise en service (construite entre 1890 et 1898), cette ligne a été le principal canal de transport de marchandises entre la capitale et le port de Matadi, où transite une grande partie des importations et exportations du pays. La réouverture de cette ligne revêt donc une importance stratégique.
Un souffle pour désengorger les routes et diminuer les embouteillages monstres sur le trajet route
Selon les experts, ce retour du rail pourrait réduire considérablement les coûts de transport, désengorger les routes surchargées et améliorer la fluidité des échanges commerciaux. Pour ceux qui ne le savent pas encore, le rail offre une capacité de transport bien plus grande que la route, avec un impact écologique moindre, tout en réduisant les risques liés aux accidents routiers. Le redémarrage de ce service ferroviaire est perçu comme une véritable bouffée d’oxygène pour les habitants du Kongo Central. Les agriculteurs, qui ont souffert d’un accès limité aux marchés en raison de l’absence de trains, retrouveront une voie de transport essentielle pour écouler leurs produits champêtres.
Ce success-story fait partie intégrante d’un méga projet gouvernemental dénommé ». Projet de Transport Multimodal en RDC (PTM-RDC) », proposé par le Gouvernement pour financement à la Banque mondiale. Ce projet vise à consolider la réunification du pays à travers la remise en fonctionnement optimal de trois principaux corridors multimodaux de commerce et de transport du pays à savoir : 1) le corridor ouest – nord -est qui relie la façade maritime à la région des lacs et desserte Matadi, Kinshasa, Mbandaka, Kisangani, Bukavu ; 2) le corridor ouest-sud-est qui opère la liaison entre la façade maritime et la région du Katanga, et enfin ; 3) le corridor nord-sud opérant la liaison entre les deux premiers corridors et desserte de la zone Est.
Les activités du Projet, en particulier, des sous-secteurs routier, ferroviaire, fluvial et maritime, vont avoir des impacts directs et indirects sur les populations autochtones vivant dans les régions concernées. Ces impacts porteront sur la démographie locale, les systèmes de production agricole et d’alimentation, la gestion de la forêt, de la faune et des terres, la culture et la santé des populations.
Il sied de noter que les travaux de construction de la ligne entre Matadi et le Stanley Pool ont été dirigés par Albert Thys qui donnera son nom à l’une des étapes, Thysville (Mbanza-Ngungu). La réalisation du chemin de fer coûta la vie à 1 932 personnes (1800 noirs et 132 blancs, d’après une inscription à la gare centrale de Kinshasa).
Journaliste économique et chroniqueur des ressources naturelles.