« Au-delà de sa dimension symbolique, l’alternance reste essentiellement un instrument et non une fin », a déclaré d’entrée de jeu l’honorable Delly Sesanga Hipungu Dja Kaseng Kapitu, élu en 2006, 2011 et 2018 dans la circonscription électorale dans la circonscription de Luiza, dans l’ex province du Kasaï occidental, au cours d’une interview exclusive accordée, ce jeudi 23 janvier 2020, à Géopolis Hebdo. Pour cet ancien ministre de la République et président de la commission politique, administrative et juridique de la chambre basse du parlement de la République Démocratique du Congo, « l’alternance est un objectif intermédiaire, un repère qui valide partiellement la construction de ce nouvel ordre politique engagé depuis Lusaka (Zambie), voulu à Sun-City (Afrique du Sud) et adopté par le peuple congolais lors du référendum constituant de 2005 ». Mais au bout d’une année, constate ce brillant avocat, la situation reste confuse et anarchique et l’autorité de l’Etat est ébranlée. Comme les mêmes enjeux demeurent, l’alternance sera mieux incarnée, pense l’élu du peuple, quand les défis liés à la qualité de la gestion de l’Etat commenceront à être relevés. Interview.

Géopolis Hebdo (GH) : C’est le premier anniversaire de l’alternance intervenue au pays. Quelle lecture faites-vous de cette réalité politique et pensez-vous qu’en une année, nous avons incarné en tant que Nation cette donne nouvelle ?

Delly Sesanga Hipungu Dja Kaseng Kapitu (DSHDKK) : Au-delà de sa dimension symbolique, l’alternance reste essentiellement un instrument et non une fin. C’est un objectif intermédiaire, un repère qui valide partiellement la construction de ce nouvel ordre politique engagé à Lusaka (Zambie), voulu à Sun-City (Afrique du Sud) et adopté par le peuple congolais lors du référendum constituant de 2005. Au bout d’une année, et l’actualité nous fournit une démonstration quotidienne, la situation reste confuse et anarchique. L’autorité de l’Etat est ébranlée. Les mêmes enjeux demeurent. L’alternance sera mieux incarnée quand les défis liés à la qualité de la gestion de l’Etat commenceront à être relevés.

L’opinion est tout de même surpris de savoir qu’Envol votre parti est dans l’opposition quand bien même vous aviez soutenu le président actuel ?

J’ai soutenu la candidature de l’actuel Président par rapport au défi historique de conquérir l’alternance au sommet de l’Etat. Ce soutien n’était à aucun moment, avant, pendant ou après les élections assorti de contrepartie autre que de faire avancer la construction démocratique par rapport à ce repère qu’est l’alternance. L’opinion ne devrait donc pas être surprise d’autant que la coalition mise en place pour gouverner le pays est bien connue dans sa composition et dans son fonctionnement. Mon parti a donc opéré ce choix face une majorité à la construction de laquelle nous sommes totalement étrangers et conformément à la loi sur le statut de l’opposition, nous avons opéré un choix d’être dans l’opposition.

En définitive, quand j’entends l’actuel président évoquer l’éventualité d’une dissolution, l’opinion devrait plutôt nous féliciter d’avoir envisagé les choses avec une prudence consommée à l’égard d’une construction majoritaire hasardeuse.

Le fonctionnement des institutions post alternance est-il selon vous à la hauteur de l’enjeu qu’impose cette coalition ?

J’observe, et ce n’est pas la première fois que je le dis, que depuis 2006 le fonctionnement des institutions est inscrite sur une courbe régressive. Il y a un net recul de la démocratie. Il n’y a qu’à observer la qualité des débats et des délibérations à l’Assemblée nationale. C’est un indicateur pertinent sur la santé de notre démocratie institutionnelle. Et vous comprendrez que les choses se sont fortement dégradées.

Il y a forcément des réformes à mettre en place pour consolider la marche vers le développement, lesquelles selon vous sont prioritaires ?

La mère des réformes aujourd’hui reste la révision constitutionnelle que nous avons engagée. Pour le reste, il y a moins besoin de réformes que de leur application. Plusieurs réformes conduites depuis 2003, amplifiées sous les deux premières législatures, ne sont pas appliquées. Les lois ne sont pas respectées et ceux qui sont sensés les faire respecter, sont généralement des gardes chasses braconniers.

La réforme de la constitution demeure l’aiguillon par lequel on peut retrouver l’essence de nos institutions et redonner force à notre démocratie. Dans cette perspective, les secteurs suivants méritent une attention particulière et qui constituent les piliers de notre démocratie : la justice, la sécurité, la décentralisation, la lutte contre la corruption et la réforme fiscale.

Propos recueillis par WAK. Texte par Dieudonné Buanali.

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