Dans une interview exclusive, le ministre d’Etat en charge de l’Economie nationale s’est livré. Le numéro 1 de l’Economie n’a éludé aucune question. Il assume son passé d’opposant en même temps qu’il défend son adhésion au Front Commun pour le Congo (FCC) auquel ce cadre de l’Union pour la Démocratie et le Progrès Social (UDPS) croit dur comme fer. Membre du comité stratégique de la nouvelle coalition, Kapika qui cite les grands noms historiques du pays, dit son amour pour son pays et estime que les supputations sur l’avenir politique du Président de la République Joseph Kabila Kabange, l’ancien opposant répond simplement que des gens sont en train de « prêter des intentions au Chef de l’Etat ».  

 Monsieur le ministre, nous avons constaté, nous petit peuple que le prix du carburant à la pompe est l’objet de marchandages politiques. C’est comme si le Gouvernement et les pétroliers s’entendaient pour pouvoir garder ce prix que vous avez augmenté par deux fois alors qu’à l’international, le prix du baril a stagné. Comme si au niveau du Gouvernement et des pétroliers, il y avait « un mariage incestueux ». Quelle est votre politique en matière de la fixation des prix des produits pétroliers au regard de ce que je viens de dire ?

D’abord, dire que le prix sur le marché international a stagné, je ne le pense pas. Quand nous avons opéré le dernier réajustement, je parle de réajustement, vous avez suivi les cris à partir des Etats-Unis d’Amérique, qui sont un grand producteur de carburant, mais qui ont aussi d’immenses stocks. C’est le président Donald Trump qui a parlé de surchauffe du prix du carburant sur le marché international. De deux, regardez autour de nous, les autres pays producteurs. Je prends le Tchad et le Gabon. Dans quel état sont-ils ? Ont-ils gardé le prix intact ? Non, ils l’ont augmenté. Allez vers les pays du Golf, parce que c’est delà que vient le gros du carburant Que s’est-il passé ? Ces pays ont compris qu’ils ne tirent des ressources que du pétrole, mais savent aussi que le pétrole pourra s’épuiser un jour. Alors, pour constituer des réserves des devises, ils ont revu à la hausse le prix du baril. Mais comme nous ne sommes pas encore producteur en tant que tel, nous vendons le pétrole brut, c’est peut-être une occasion pour dire qu’au niveau du Ministère des Hydrocarbures, il y a deux petits projets, très intéressants et moins couteux dont le Ministre des Hydrocarbures s’occupe, c’est lancer nos propres raffineries, ne serait-ce que pour les besoins locaux. C’était une parenthèse. Il n’y a pas seulement que le prix sur le marché mondial qui est en train de monter, il y aussi le taux de change. Le carburant, nous l’achetons en devise. Il n’est que normal que si le taux de change évolue dans l’un ou l’autre sens, particulièrement la hausse, puisque nous parlons de l’augmentation du prix, il faut le revoir. Là, intervient l’autre paramètre comme le volume de  consommation, etc. Je voudrais aussi ajouter ceci et c’est très important, souvent lorsqu’on revoit le prix à la hausse, les esprits se surchauffent à travers le pays. Je l’ai toujours dit et je voudrais le répéter. Mais qu’est-ce qu’il y a dans le prix du carburant, il y a du carburant que nous donnons à l’Armée nationale, à la Police, à tous nos services d’intelligence, à Congo Airways, à la SNCC, à Transco, aujourd’hui à New Transkin, à la société qui s’occupe de la lutte contre la pollution particulièrement dans la province du Kongo-Central où il y a des exploitations pétrolières. Nous donnons du carburant au  FONER, à l’Office des Routes, à l’OVD, pour l’entretien des routes de desserte agricole et j’en passe. Si nous éliminons tout cela, nous avons le carburant à un prix inférieur. Mais on ne peut pas éliminer cela, il faut qu’on trouve des recettes additionnelles. Nous connaissons la hauteur de notre budget.

Mais excellence, c’est quand même étonnant. Les quelques  entreprises que vous venez de citer qui reçoivent du carburant, sont des entreprises à chiffres d’affaires. Ce ne sont pas des entreprises philanthropiques. Elles font de l’argent. Elles ont un chiffre d’affaires, elles peuvent donc intégrer dans leur bilan les charges en approvisionnement en carburant parce que les consommateurs paient ça. Si elles sont subventionnées en même temps par l’Etat sur le carburant, ça signifie que les services doivent être quand même de qualité. Ça, c’est un. De deux, le prix du carburant n’a pas baissé chez nous même quand il y avait baisse du prix du baril. Vous avez maintenu ce prix sans le baisser. Et à l’époque, on ne parlait pas encore du taux de change. La Banque Centrale du Congo a dit qu’on a maitrisé le taux de change…

Je ne sais vous faites allusion à quelle période. D’abord, vous avez raison dans votre argumentaire, mais je n’ai pas de précision sur la période parce qu’il y a deux autres paramètres. Peut-être que pendant qu’il y avait baisse du baril, il y avait hausse du taux de change, parce que le taux de change chez nous ne dépend du seul paramètre pétrole. Vous avez parlé des entreprises auxquelles nous donnons du carburant, vous dites qu’elles font des recettes et qu’elles devront  s’autofinancer. Un argumentaire que je ne peux pas détruire. Mais, je voudrais aussi ajouter ceci : dans le monde entier, le transport public est subventionné par l’Etat. Voilà pourquoi nous donnons du carburant à TRANSCO. Il faut que le prix du billet soit à la portée de la population. Vous avez parlé tout à l’heure du petit peuple. Mais ce petit peuple ne roule pas en Limousine et ne prend pas n’importe quel moyen de transport.

Je vais parler de Congo Airways. Nous n’avions plus de Compagnie de transport aérien, tout était tombé par terre. C’est dans la structure du prix du carburant, avec le concours des autres sociétés de l’Etat, dont je vais taire le nom ici, qu’on a pu créer notre propre société nationale. Il fallait la soutenir jusqu’à ce que, à un moment donné, elle vole de ses propres ailes. C’est comme ça que nous lui donnions un équivalent de 500 000 dollars en produits pétroliers, c’est-à-dire, en carburant et lubrifiant, par mois. Etant donné que Congo Airways commence à décoller, nous avons retiré sur les 500 000, l’équivalent de 250 000 dollars par mois. Encore, il faut dire que ce n’est toujours pas les 250 000 qui tombent, ça dépend du volume de consommation. Mais, je prends les statistiques globales. Nous avons pu renforcer TRANSCO et New Transkin. Nous poursuivons cela de manière à permettre à la population de continuer à prendre le transport en commun à un prix abordable.

La SNCC, ne nous faisons pas d’illusions. C’est vrai que Stanley avait dit que sans le chemin de fer, le Congo ne vaut pas un penny. Mais notre Société nationale de chemin de fer était trop dépendante de la Gécamines. Une fois que la Gécamines a eu des problèmes, ce sont des gros transporteurs qui viennent de partout prendre les minerais. A partir de ce moment-là, la SNCC a eu des problèmes. Nous savons aussi que la SNCC à l’arrêt, c’est la paralysie dans tout l’espace Kasaïen et l’espace Katangais. Fallait-il laisser faire cette paralysie qui allait affamer une grande partie la population, parce que le trafic de ce côté-là est fait ainsi : le maïs, les vivres, le carburant, doivent servir la population. C’est comme ça que nous avons dit qu’il faut nécessairement donner du carburant à la SNCC pour permettre le ravitaillement, particulièrement de ces deux espaces-là. Si on ne l’avait pas fait, je crois que nous ne parlerions plus ni du Katanga, ni du Kasaï aujourd’hui.

Lorsque vous êtes arrivés, monsieur le Ministre, vous avez montré des muscles notamment au  niveau de l’exercice du petit commerce. Vous aviez dit ‘’le petit commerce aux Congolais’’. Maintenant vous donnez l’impression d’avoir abdiqué. Vous laissez faire. Aujourd’hui, le petit commerce est entre les mains des Libanais et autres Indo-Pakistanais. Nous n’avons rien contre eux, mais ils sont là et les Congolais sont complètement évacués. Allez sur l’avenue du Commerce, sur Victoire, vous verrez que les Congolais n’ont plus de commerce, ils sont devenus des esclaves de ce système d’exploitation. Vous aviez pourtant promis de mettre de l’ordre dans ce secteur, et puis, vous avez arrêté…

Non, je n’ai pas arrêté. D’abord, vous vous êtes arrêtés, vous, qu’à Kinshasa. Mais, je dois avoir l’honnêteté de vous dire que ce que vous avez décrit, nous le trouvons partout. Nous sommes en train de préparer un atelier. Les organisations patronales, c’est-à-dire, la FEC, la COPEMECO et la FENAPEC, nous-mêmes gouvernement pour bien gérer ce secteur-là en respectant la loi qui veut que l’exercice du petit commerce revienne aux nationaux.

Si nous y allons brutalement, imaginez que je m’en ferme dans mon bureau aujourd’hui, je prenne un arrêté dans lequel je dis, Libanais, Indien, Pakistanais ou Ouest-Africains, fermez, mais le lendemain, il n’y aura plus rien ! D’où j’estime que cette concertation est nécessaire. Nous allons nous mettre d’accord sur un moratoire pendant lequel ces gens se préparent à ne s’arrêter qu’au commerce en gros et qu’il y ait des Congolais qui se préparent à prendre la relève. Il ne faut pas  prendre une mesure brutale, le lendemain tout est fermé, qu’est-ce qu’on va dire ? Le gouvernement est incompétent, il a tué le pays.

Donc, c’est une matière extrêmement sensible, il faut y aller lentement. Si nous y allons brutalement, il y en a qui vont parler de Zaïrianisation, de radicalisation, de Congolisation, etc. certains vont même dire détérioration du climat des affaires. Nous allons organiser cet atelier bientôt et j’insiste sur le dialogue qui doit exister entre ces opérateurs économiques-là et le Gouvernement.

Dernière question sur le volet économique. Nous sommes à 5 mois de la fin de l’année et les chiffres en ma possession montrent que la croissance a un ralentissement. On est même à -3% qui était le chiffre de la prévision et quand on nous scrute les raisons de ce ralentissement, on nous parle du mécontentement de certains opérateurs, notamment les miniers qui sont mécontents de la réforme mise en place, c’est-à-dire le nouveau Code minier. Mais dans le cadre du Code minier, vous ministre de l’Economie, on vous a vu un peu à l’écart. Vous n’avez pas pris parole, mais c’est quand même l’Economie. En même temps, pendant que vous êtes restés silencieux, les opérateurs remarquent que vos services à vous descendent sur terrain avec des contrôles intempestifs qui sont parfois des rançonnements qui étouffent même l’activité économique, parce qu’ils viennent constamment partout à la recherche de la maximisation des recettes. C’est une petite contradiction. Je voudrais quand même que sur ce point, vous nous disiez exactement ce que vous en pensez.

D’abord, le ministre de l’Economie n’est pas resté bouche cousu en ce qui concerne les négociations sur le Code minier. Aussitôt nommé, j’ai représenté le Président de la République à la semaine minière qui s’était tenue à Lubumbashi. Et c’est moi qui, sur instruction du Chef de l’Etat, avait demandé aux miniers de rapatrier des devises. Donc, je n’étais pas absent.

Le reste des débats, nous les avons au sein du Gouvernement, au sein du comité mixte stratégique, au niveau du comité de pilotage. Je vais même profiter de l’occasion pour vous dire que Martin Kabwelulu qui est Ministre des Mines, c’est mon vieux condisciple de l’Université. Nous sommes entrés à l’Université le même jour, nous avons fait les mêmes études et nous avons terminé le même jour. Il est au quatrième niveau, je suis au cinquième, nous avons tous les jours le temps de nous concerter et de parler. Le contrôle, c’est vrai. Mais essayer un jour de relâcher le contrôle chez vous, ça devient du désordre. Il y a des lois que la République a prises qui doivent être respectées. J’ai toujours dit aux opérateurs économiques ceci : il est surprenant que dans vos services, on trouve des services d’audit, contrôle de gestion, contrôle de ceci et de cela. Vous quand vous envoyez ces contrôleurs auprès de votre personnel, je ne sais pas si vous les tracassez. L’Etat envoie ses contrôleurs pour s’assurer que les lois sont respectées, que vous observez tout ce qui concerne la structure des prix, le paiement des impôts, c’est de la tracasserie, non. Il ne faut pas que ce que vous faites en toute quiétude, les autres ne le fassent pas. Le jour où on arrête ces contrôles, ça sera du désordre. Qui peut vivre dans le désordre ?

Mais le contrôle ne doit pas être intempestif fait sur le rançonnement, sur la corruption…

On le dit, je ne viens pas ici pour me justifier de quoi que ce soit. Je ne peux pas dire qu’il n’y a pas dérapage. Il y a toujours des petits dérapages. Mais ce n’est pas à cause de ces petits dérapages que nous devons relâcher avec le contrôle. Mais, j’ai toujours demandé par écrit aux opérateurs économiques, j’envoie mes équipes. Celui qui estime que ces équipes sont venues pour rançonner et tracasser, qu’il appelle. Il y en a qui m’appellent. Mais vous savez dans cette histoire de rançonnement, de corruption, il y a deux acteurs : le corrupteur et le corrompu, le rançonneur et le rançonné. Mais, le jour où le corrupteur et le rançonné disent, « on arrête ça », on ne va plus en parler.

Monsieur le Ministre d’Etat. Vous êtes un homme politique. Vous êtes connu comme avoir été membre de l’UDPS et ensuite, comme proche d’Etienne Tshisekedi, presque son représentant dans beaucoup des conciliabules. Aujourd’hui, vous êtes au Gouvernement. Avez-vous l’impression d’avoir trahi Etienne Tshisekedi ?

Pas du tout. Je suis fier d’être au Gouvernement tout simplement parce que l’Accord de la Saint-Sylvestre avait eu la bénédiction d’Etienne Tshisekedi. Si Etienne Tshisekedi n’avait pas donné le mot d’ordre à ces délégués à ces négociations, personne ne l’aurait signé. J’étais le premier, je continue à le dire, c’est le testament d’Etienne Tshisekedi. C’est le dernier document politique qu’il a laissé sur cette terre, qu’il a laissé aux Congolais. Quelqu’un qui viendrait dire, « il a trahi Tshisekedi », qu’il me le prouve.

Par exemple votre propre parti l’UDPS a continué à dire que cet Accord n’a pas été bien respecté, qu’il n’a pas été appliqué en totalité…

Là, vous abordez une question très fondamentale parce qu’il n’y a pas seulement une partie de l’UDPS. Aujourd’hui, il y a combien des UDPS ? Il y en a quatre. J’ai même appris qu’il y a un autre regroupement qui va aller aux élections, les pionniers de l’UDPS. On peut dire qu’il y en a cinq. Il y a une UDPS qui est à Limete, qui estime que l’Accord n’a pas été correctement ou totalement appliqué. C’est aussi le langage de tous nos frères et sœurs qui sont dans l’opposition aujourd’hui. Je crois qu’à un certain niveau de responsabilité, il ne faut se limiter aux communiqués de presse, aux déclarations pour dire que l’Accord n’a pas été appliqué. Non, non. Il faut avoir le courage de dire qu’est-ce qui a été appliqué, qu’est-ce qui ne l’a pas été. Et aller plus loin. C’est ça le courage politique qui manque. Aller plus loin et dire, comme ça n’a pas été appliqué, appliquons-le. Et qu’ils proposent des mécanismes pour bien l’appliquer. Ça ne sert à rien de continuer à claironner tous les jours que l’Accord n’a pas été appliqué, sans dire exactement qu’est-qui n’est pas appliqué, qu’est-ce qui n’a pas été fait.

On vous a dit par exemple que le Premier ministre, celui qui a été choisi n’est pas celui qui devait être là. On vous a dit qu’il y a des prisonniers emblématiques qui sont encore en prison, on vous a dit que l’espace public n’est pas totalement libéré, on vous a dit qu’il fallait mettre une autre équipe au niveau du CNSA… Ce sont des choses que les opposants disent. Vous ne pouvez pas dire que vous n’avez pas entendu ça, monsieur le Ministre…

On a dit que le Premier ministre qui est là ne devait pas l’être. Mais qui devait être là ? Je ne vais pas citer les noms des gens. Mais, c’est vous de la presse ! C’est devant la presse qu’un grand responsable de l’UDPS/Limete a dit que la personne dont on parle n’avait pas été désigné. Reprenez vos archives. Finalement, qui est-ce que le président Tshisekedi avait désigné ? Je ne sais pas. Il faut leur retourner la question. Parce que, j’insiste, ils estiment que l’Accord n’ayant pas été bien appliqué, il y aura de mauvaises élections. Or, nous avons tous le souci de bonnes élections. Des élections apaisées. Les prisonniers emblématiques dont vous parlez. Non, non. J’ai été le premier à m’opposer à ce nom-là et les amis le savent. Ce n’est pas parce que je suis Ministre d’Etat aujourd’hui. Je ne dis pas que c’est ça l’infraction qu’ils ont commise : je vole une boite de sardine de quelqu’un, on me jette en prison, pour des besoins politiques, on dit « il est emblématique ». Mais un homme emblématique ne doit justement pas voler.

Vous savez que la procédure pour certains n’a peut-être pas été respectée. Mais là n’est pas le problème. Le problème est que ça été quand même dans l’Accord de la Saint-Sylvestre. Une résolution de cet Accord dit que ceux qui sont en prison pour des raisons politiques, soient libérés.

Les mêmes qui ont été peut-être au centre comme médiateur de l’Accord, ou signataire de l’Accord, ce sont les mêmes aujourd’hui qui parfois disent non, non, au nom de tel principe, tel ne peut pas sortir. Je suis acteur politique, je côtoie tout le monde. Dans cette affaire, il y a à boire et à manger.

Alors pendant tout le temps qu’il a été avec vous, Etienne Tshisekedi vous a donnés des leçons sur l’Etat des droits, sur le combat politique de la démocratie. Aujourd’hui, vous êtes Ministre d’Etat, vous avez signé la charte du FCC qui est cette plateforme qui est en train de prendre de l’ampleur. Mais qui n’est pas dirigé dans le sens où Etienne Tshisekedi l’aurait voulu. Vous pensez que s’il était en vie, il vous aurait autorisé de signer pour le FCC ?

Quiconque connait Etienne Tshisekedi et le sens de son combat, sait qu’il ne serait jamais opposé au FCC pour une raison bien simple. Etienne Tshisekedi a consacré toute sa vie au combat pour le Congo. Vous avez eu à côtoyer personnellement Tshisekedi. Combien de fois ne vous a-t-il pas dit, « nos problèmes, nous les réglons, nous-mêmes ?». Il l’a répété plusieurs fois. Il avait un amour immense pour le Congo. Quand les guerres éclataient à gauche ou à droite, c’est toujours Etienne Tshisekedi qui menait des démarches pour que la paix revienne. Il s’est battu pour l’unité et la prospérité du Congo. Est-ce que ce n’est pas ce que veut le FCC ? Dites-moi un seul instant où le président Tshisekedi a posé un acte contre le Congo.

Lui n’est plus là. C’est vous qui avez posé un acte en responsable. Alors, dites-nous aujourd’hui, indépendamment des contraintes politiques qui peuvent exister. Qu’est-ce qui vous a convaincu à adhérer au FCC ?

Non, non, il n y a pas eu de contrainte politique parce que c’est moi qui ait présenté le condensé de nos travaux dans une de nos réunions à Kingakati, et mes collègues Ministres sont là, le chef de l’Etat est là, j’avais insisté sur la liberté de chacun de nous à adhérer au FCC. Je n’ai pas été contraint. Je suis allé par conviction.

Quels sont les arguments qui vous ont convaincu à adhérer au FCC ?

Je ne serai pas long. Nous avions une première séance de travail, on s’était retiré à Kingakati avec le Président de la République qui nous fait un aperçu de l’histoire de notre pays depuis 1960 jusqu’à nos jours. En résumé, dans les années 1960, il y a des guerres. Lumumba est assassiné. Mais tout le monde sait qui a tué Lumumba. C’est vrai qu’on a utilisé les Congolais. Mais les vrais assassins sont connus. On a utilisé les congolais parce qu’ils n’étaient pas unis. Toute la vague des rébellions-là, vous trouvez toujours une main extérieure. La guerre du Shaba, 80 jours, elles viennent d’où ? C’est parce que tous les ennemis du Congo profitent de nos querelles, de nos disputes. Ils disent, c’est le moment. En Tshiluba, il y a un adage qui dit que le sorcier n’a de force d’agir que là où on se dispute. Nous avons fait que nous disputer. L’AFDL, c’est une dispute qui profite de nos querelles intérieures. Après l’AFDL, il y a eu le RCD, le MLC, toujours des querelles intérieures. Le chef de l’Etat chutera pour nous dire, j’ai beaucoup d’éléments pour vous dire que la situation est encore très fragile. Si nous ne nous unissons pas, si nous ne nous mettons pas d’accord ensemble, tout peut arriver. Vous la presse, vous avez beaucoup de données sur les pays voisins. Les pays qui n’ont pas connu des guerres et des chamailleries, avancent. J’ai eu même à dire et je le dis souvent aux amis, ces gens en faisant semblant de venir nous libérer, eux travaillaient. Mais nous, nous devons nous battre. Je viens de Lusaka en Zambie où j’étais au sommet du COMESA, j’ai découvert un très beau pays, la Zambie et une belle ville, celle de Lusaka. Vous connaissez l’histoire mieux que moi, il n’y a pas eu de guerre en Zambie. « Là, c’est un peuple, une nation », disait le président Kenneth Kaunda.

Cet argument tient monsieur le Ministre. Mais qu’on se rappelle de se mettre ensemble seulement à la veille des élections alors qu’on a eu dix ans, le temps est suspect quand même. Ça enlève à la démarche la noblesse de la cause…

Non, non, il y a un temps pour tout. Vous dites que ça pouvait arriver avant. Je ne sais pas quelle question vous m’auriez posée si j’avais adhéré il y a dix ans. J’adhère à la veille des élections, vous estimez que c’est suspect. Mais quand est-ce qu’on aurait eu cette idée-là parce que la situation de notre pays est encore fragile.

Quand vous étiez apposant, il y a des choses que vous disiez à la presse et à l’opinion publique sur la gestion de Joseph Kabila et de son Gouvernement. Vous critiquiez beaucoup cette gestion, vous étiez en train de les mettre au pilori. Aujourd’hui que vous adhérez à cela, comment intellectuellement vous assumez les déclarations d’avant ? C’est vous qui vous étiez trompés ou vous avez changé de point de vue ?

Nous assumons tous cela. Je vous ai dit que je suis au Gouvernement à la faveur de l’Accord de la Saint-Sylvestre. Un Accord entériné par le président Etienne Tshisekedi qui n’avait qu’un seul souci : le Congo, la paix pour le Congo, l’avenir du Congo. Et en  politique, si vous continuez à vous diaboliser, vous enfoncez le fossé et vous n’avancerez jamais. Non, je vous dis bien que je suis là parce qu’il y a un Accord. De deux, je suis au FCC, parce que j’estime que parce qu’il faut épargner à notre pays toutes ces affres-là et enfin, nous mettre sur la voie du développement. Je reçois beaucoup de délégations. J’étais en Chine, de là je suis allé à Lusaka. Mais tout le monde vous le dit : quel est cet investisseur qui va venir là où il y a du bruit ? Aujourd’hui, c’est Kamuina Nsapu, le Maï-Maï, les Bundu Dia Congo. Tout cela joue. Mais mettons-nous ensemble pour mettre fin à cela.

En quoi est-ce que la mise en place du FCC va rétablir la paix, la tranquillité et le calme ?

C’est une question fondamentale. Je crois que dès lors que grâce à cette structure, beaucoup des Congolais comprendront qu’il faut d’abord sauver le Congo, il n’y aura plus de querelles. Nous avons besoin de cette unité et cette cohésion. Le jour où on aura ça, je crois qu’il n’y aura plus quelqu’un pour venir perturber la paix ici. Il n’y aura plus des investisseurs qui diront il y a eu Kamuina Nsapu, il y a eu ceci ou cela. Nous sommes victimes de nos querelles. Il est grand temps de nous mettre ensemble, regarder dans la même direction. Dieu nous a donnés un pays riche potentiellement. Mais qu’est-ce que nous avons tiré de ce pays et si ça continue, qu’est-ce que nos enfants, nos arrières enfants auront ?

Vous êtes un responsable politique important et vous avez toujours agi en connaissance de cause. Là, vous avez signé la charte du FCC et vous vous êtes engagés à désigner le candidat à la présidentielle qui viendrait du FCC, même si vous ne le connaissez pas. Comment vous avez fait pour accepter cela ?

Ça ne va pas se faire comme cela. Je sais qu’on est en train de  prêter beaucoup d’intentions au chef de l’Etat. Je ne pense pas que celui que nous soutiendrons, nous l’aurons soutenu alors que nous le connaitrons bien avant cela.

Donc, vous supposez que le temps viendra où vous le connaitrez et choisirez…

Mais tout à fait !

Vous êtes très bon sur les questions politiques, mais vous êtes un homme d’Etat. Alors, vous acceptez que l’héritage de votre parti l’UDPS, qu’on aille aux élections avec 5 UDPS, vous pensez que ceci est un signe de paix ? Vous trouvez cela normal. Ne vous êtes-vous pas prêtés à la manipulation de la Majorité présidentielle (MP) qui a fini par vous diviser, vous atomiser ?

Il ne faut pas culpabiliser la MP. Il faut culpabiliser les cadres de l’UDPS. Ce sont eux. Mais comment voulez-vous parler des grands responsables comme ça qu’ils sont manipulés ? Ce sont eux. Vous vous souvenez, à l’occasion du premier anniversaire de la mort du président Tshisekedi, dont je continue à m’incliner sur la mémoire, je ne suis pas allé à un quelconque culte. Il y a eu trois cultes à Kinshasa. Je n’ai été ni à l’un, ni à l’autre parce que j’appelle à l’Unité. Je dis aux amis, « ne nous faisons pas d’illusions, parmi nous personne ne peut prétendre qu’il est devenu un leader, écouté, respecté et suivi comme Etienne Tshisekedi. »

J’avais toujours démontré que la popularité et la crédibilité d’Etienne Tshisekedi était de loin la crédibilité et la popularité. On respectait les cadres de l’UDPS parce qu’on savait qu’on savait qu’ils sont derrière Tshisekedi qui incarnait beaucoup d’espoir pour le peuple Congolais. Tshisekedi parti, la meilleure façon de résister c’était de faire l’unité. Mais les amis n’ont pas compris. Il ne faut pas culpabiliser la Majorité présidentielle ou un quelconque individu, non !

Maintenant, sous quel label allez-vous vous présenter aux élections ?

Tout le monde me pose la même question. Même ma femme. Dans mon fief à Kazumba, on me pose la même question. Je leur dis, le moment venu, vous le saurez. De toute manière, je vais à Kananga samedi prochain pour déposer ma candidature pour les élections législatives nationales. C’est en ce moment-là que vous saurez dans quel regroupement je suis engagé.

La prison vous avez connu, les relégations, la traque, les difficultés. Aujourd’hui, vous êtes un homme relativement en paix. Votre combat politique et votre position actuelle, si vous pouvez les résumer en quelques mots, ça sera quoi ?

Le combat pour un Congo meilleur où règnent la démocratie, la paix et la justice. Un Congo pour les Congolais seuls. C’était ça le leitmotiv d’Etienne Tshisekedi qui nous avait toujours dit «  aimez-vous les uns, les autres ». Il ne nous a jamais appris à nous chamailler. Et au sein de cette charte du FCC, le soubassement, le socle, c’est l’amour, l’entente entre les Congolais.

Par rapport à votre parcours…

J’ai résumé mon parcours en disant que derrière avec Etienne Tshisekedi, c’est un combat pour la paix, la démocratie, le progrès social, c’est-à-dire, le bien-être de la population. Mais vous ne pouvez pas réussir tout ça si vous ne vous aimez pas. Le jour où les Congolais vont s’aimer, vont se tenir main dans la main, nous ferons de ce pays une merveille. C’est tout ce dont je suis convaincu. Je crois que c’est possible avec le FCC qui appelle les Congolais qui aiment le Congo. Lumumba a aimé le Congo, Kasa-Vubu a aimé le Congo. Etienne Tshisekedi a aimé le Congo. Gizenga aime le Congo. Malula a aimé le Congo. Kimbangu a aimé le Congo. Vous aimez le Congo. Mais pourquoi toutes ces attaques contre le FCC ? Ceux qui attaquent le FCC en lui collant toutes sortes de sobriquets, probablement, ils n’aiment pas le Congo.

                                  Propos recueillis par WAK et Patrick Ilunga 

 

 

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