En proie à des fléaux des sécheresses interminables, des plaines inondées et des moyens de subsistance perturbés de centaines de millions de personnes, le continent africain est arrivé à la conférence des Nations unies sur le changement climatique, la COP29, qui se tient à Bakou, en Azerbaïdjan, avec un message puissant – appelant à rien de moins que la justice climatique et la responsabilité financière de la part des nations les plus riches de la planète.
Le groupe des négociateurs africains (AGN) a proposé un nouvel objectif collectif quantifié (NCQG) de 1 300 milliards de dollars par an d’ici à 2030.
Sous la houlette du président de l’AGN, Ali Mohamed, qui est également l’envoyé spécial du Kenya pour le changement climatique, les revendications de l’Afrique ont mis en évidence, au cours des quatre derniers jours, l’iniquité d’une crise que ses habitants n’ont en grande partie pas créée, mais dont ils subissent gravement les conséquences.
Alors que le continent est confronté à des impacts climatiques de plus en plus importants, les dirigeants et les délégués africains se sont unis à Bakou pour réclamer un financement transformateur, contraignant et accessible pour le climat.
Dans chaque salle, chaque discussion plénière, chaque obstacle convoqué à la hâte, ils exigent que cet engagement aille au-delà des promesses vides et réponde aux besoins urgents d’adaptation et d’atténuation de leurs communautés.
Ali Mohamed a donné le ton en adoptant une position claire et inébranlable, déclarant lors d’une réunion d’information que « les besoins de l’Afrique ne sont pas négociables ».
« Il s’agit d’une question de survie, non seulement pour nous, mais aussi pour la planète », a déclaré Mohamed. « Nous avons besoin d’un financement pour le climat qui soit fiable, réalisable et juste ».
Ses propos ont été repris par la quasi-totalité des leaders africains présents à ces négociations. Ces responsables de délégations ont tous uni leurs voix pour réclamer un mécanisme de financement de la lutte contre le changement climatique qui produise des résultats concrets et rende compte de son action.
Ils ont passé cette semaine ici à dire aux pays développés que la promesse de 100 milliards de dollars par an qu’ils ont faite il y a près de dix ans n’a toujours pas été tenue.
Cet objectif, qui n’a pas été atteint et qui n’a pas fait l’objet d’un suivi adéquat, est loin de répondre aux besoins auxquels les pays africains sont confrontés sur le terrain, ont-ils déclaré.
Nous ne sommes pas responsables de cette crise, mais nous en payons le prix. Il n’est que juste que les responsables prennent leurs responsabilités ».
Une bouée de sauvetage essentielle
La demande annuelle de 1 300 milliards de dollars, bien que considérée comme ambitieuse par certains, reflète le coût réel de l’adaptation au changement climatique, du renforcement de la résilience et de l’investissement dans les énergies renouvelables sur le continent. Pour l’Afrique, il ne s’agit pas d’une simple liste de souhaits, mais d’une ligne de vie essentielle à sa survie.
M. Mohamed a ajouté que « le NCQG est un outil permettant de corriger les échecs du passé » et qu' »il exige des pays développés qu’ils aillent au-delà de vagues engagements ».
« Il est temps de rendre des comptes, de faire preuve de transparence et d’obtenir des résultats en matière de financement de la lutte contre le changement climatique », a-t-il déclaré.
Les négociateurs africains demandent que le financement de la lutte contre le changement climatique soit fortement ancré dans les finances publiques, en mettant l’accent sur les subventions et les fonds concessionnels.
Cette demande découle d’une frustration commune face au fardeau de la dette qui pèse déjà sur de nombreuses nations africaines. Ils souhaitent au contraire un financement qui renforce la résilience sans aggraver leurs difficultés budgétaires.
De nombreuses banques et institutions financières mondiales ont largement ignoré les pourparlers de Bakou en raison des inquiétudes suscitées par les engagements non tenus en matière de financement de la lutte contre le changement climatique, des questions de responsabilité et de la surveillance croissante de leurs investissements dans les combustibles fossiles.
Malgré les promesses d’action climatique, de nombreuses institutions financières doivent encore s’aligner pleinement sur l’Accord de Paris, ce qui rend leur présence à la COP29 inconfortable dans un contexte de critiques croissantes.
C’est peut-être l’une des raisons pour lesquelles les dirigeants africains participant à ce sommet ont été particulièrement loquaces sur les obstacles systémiques qui les empêchent d’accéder au financement climatique.
Actuellement, de nombreux pays africains sont empêtrés dans des processus bureaucratiques qui retardent les financements urgents. La proposition du NCQG de l’AGN appelle à rationaliser l’accès aux fonds, à réduire les formalités administratives et à garantir un flux de ressources plus efficace pour les projets d’adaptation et de résilience sur le terrain.
Bien que la délégation africaine affirme avoir fait des progrès considérables pour convaincre les dirigeants mondiaux de joindre le geste à la parole, certains craignent encore que, comme lors de nombreuses autres COP, qu’ils ne sortent pas de ces négociations avec des promesses et engagements sur papier seulement. Les pays développés ont exprimé une certaine volonté de discuter du financement de la lutte contre le changement climatique, mais ils restent prudents.
Cette semaine, des discussions ont eu lieu sur les modèles de financement mixte qui pourraient tirer parti des ressources publiques et privées, mais les critiques soutiennent que ces mécanismes pourraient ne pas fournir l’aide urgente, sous forme de subventions, dont les pays africains ont besoin.
De plus, pour ces pays, l’idée d’un financement à des conditions très favorables – plutôt que des prêts ou des instruments fondés sur le marché – reste un point de désaccord majeur.

Journaliste intéressé par les grands ensembles régionaux (Comesa, EAC etc), mais aussi intéressé aux questions environnementales et sécuritaires.
E-mail : patilunga35@gmail.com