mots ne suffiront pas pour exprimer l’étendue du séisme dans l’âme congolaise, à l’annonce d’une mort perçue comme une catastrophe nationale tant personne n’avait voulu envisager publiquement cette disparition qui relève tout de même de la nature humaine. Etienne Tshisekedi Wa Mulumba, icone de la vie politique et interrogateur permanent de la solidité de notre confort affiché. Homme parmi les hommes, il n’a revendiqué qu’un statut, celui de mener un combat pour l’avènement d’un Etat de Droit et pour l’instauration effective de la démocratie en République Démocratique du Congo. Fallait-il pour cela mener une lutte ? Fallait-il pour cela y consacrer toute une vie ? Ne pouvait-il pas un moment donné dire que j’avais fait ma part, aux autres de continuer ? Avec des larmes aux yeux et des cris de détresse des millions de congolais de toutes les conditions se sont sentis mal dans leur peau, se demandant s’ils étaient dignes d’un tel sacrifice, d’un tel don de soi poussé aux confins du devoir, jusqu’au bout du devoir, au-delà du supportable. Etienne Tshisekedi a porté les stigmates dans sa chair de l’intolérance politique, il a accepté de considérer qu’à aucun moment il ne combattait un homme, mais un système capable de faire croire à certains qu’ils avaient le droit d’avilir leurs semblables.
Il s’est projeté à un niveau élevé de conscience et s’est donné les moyens de vivre son idéal. Ce sacrifice, cette correspondance entre les attitudes, les postures, et ses convictions ont fini par toucher l’ensemble du peuple, et même ses adversaires qui considéraient qu’il était un homme de valeur qui se battait pour un idéal noble. C’est cet homme-là, compagnon de 13 parlementaires, président de l’Union pour la démocratie et le progrès social, UDPS, premier parti d’Opposition clandestin au régime Mobutu, c’est lui qui a quitté son corps pour aller vers son créateur. Il a ainsi gagné une place dans la hiérarchie nationale des ordres mystiques fondateurs de notre cosmogonie. C’est pour cela qu’il est appelé MUHULA NKWASA, plein dans son fauteuil, littéralement.
Personne d’autre n’occupera la place qu’il a occupé dans le cœur des congolais, il règnera à jamais au panthéon des héros nationaux, sur la liste des monstres sacrés de l’histoire du Congo. Il a, par la force du verbe, produit un déterminisme politique au point qu’il est devenu un baromètre de l’intégrité, une source pour d’autres de se donner une image positive à l’endroit du peuple.
Il sera sans doute difficile à beaucoup d’avoir des témoignages personnels d’un homme qui se laissait aller à la camaraderie. Non, il fut un homme profondément marqué par son sens du devoir et par l’exemple qu’il donnait que chacun autour de lui devait s’assumer au prorata de sa conscience comme être social.
C’est pourquoi, le plus bel hommage que l’on puisse lui rendre est de montrer qu’on a compris son combat, qu’on est des hommes mûrs, capables de mener le bon combat et surtout capables de nous passer de lui, sans l’oublier et continuer à l’honorer. En démontrant qu’on est incapables de prendre des décisions en son absence, alors on fait mal à son héritage. Etienne Tshisekedi, un homme d’exception, un père aimant, un maitre intransigeant, un leader solitaire, une pensée éternelle pour les générations futures qui sauront que cette terre du Congo a un jour abrité une vie puissante, un destin signalé. Elles sauront qu’il fut un homme parmi les hommes, mais un esprit supérieur qui a su dompter l’égoïsme naturel pour conquérir les espaces de conscience en faisant un avec l’univers.
Etienne Tshisekedi Wa Mulumba, jamais sans toi !
Adam Mwena Meji

Journaliste intéressé par les grands ensembles régionaux (Comesa, EAC etc), mais aussi intéressé aux questions environnementales et sécuritaires.
E-mail : patilunga35@gmail.com