Comme un coup de massue, l’accord de Nairobi vient d’apporter un changement radical dans la perspective électorale actuelle. Le fait que deux poids lourds de l’opposition se soient mis en phase de construire un ticket pour les élections futures et de fonder une alliance qui soit totale sur une éventuelle gouvernance mutuelle, ceci n’est certes pas nouveau mais est suffisamment rare pour être signalé.
Félix Tshisekedi et Vital Kamerhe, respectivement Président national de l’Union pour la Démocratie et le Progrès Social (UDPS) et leader de l’Union pour la Nation Congolaise (UNC), ont poussé les autres formations politiques de deux camps (Majorité et Opposition) de revoir leur note d’analyse et de corriger rapidement leurs projections car, la scène politique vient de s’enrichir d’une nouvelle donne, celle des hommes qui réclament du politiquement correct et qui sont à la tête de deux formations politiques à longue expérience démocratique.
On se souvient qu’à l’élection présidentielle de 2011, l’UDPS et l’UNC avaient respectivement la deuxième et la troisième place.
A l’Assemblée Nationale, ces deux partis n’ayant pas été dans un même groupe parlementaire, étaient suffisamment puissants pour piloter chacun un groupe parlementaire. L’alliance entre Félix Tshisekedi et Vital Kamerhe ne peut être évacuée d’un coup de main par la superficielle analyse.
Il est important d’y accorder l’intelligence stratégique nécessaire. D’ailleurs, les états-majors des partis et regroupements politiques de l’opposition ont été les premiers à réagir en donnant une lecture appropriée et une suggestion de gestion politique.
Comprenant le changement intervenu au sein des pronostics politiques, certains partis et non des moindres proposent un rapprochement entre l’accord de Genève et celui de Nairobi, et de permettre aux forces dites de changement de se positionner pour obtenir des résultats substantiels aux élections. Seront-ils entendus ? Seul le proche avenir nous le dira car, au sein de l’opposition, les rapprochements butent sur les montagnes des egos, et les escalades verbales sont une arme défensive. Néanmoins, c’est une réaction de réalisme car, l’union reste la force de toute action de groupe.
Une autre réaction est celle des bases respectives qui ont apporté leur soutien à la mise en place de ce ticket et dont les deux secrétaires généraux (Jean-Marc Kabund A Kabund et Jean-Baudouin Mayo Mambeke, NDLR) ont signé un communiqué conjoint (Lire en page 3) en se préparant à accueillir ces deux leaders de la manière qui soit à l’image de ces partis des masses.
La troisième conséquence est la pression qui est désormais exercée sur les autres candidats à la présidentielle du 23 décembre prochain qui n’ont pas signé à Genève (Suisse), et qui ne sont pas dans l’Accord de Nairobi (Kenya) et qui se réclament de l’opposition. Il leur est demandé par les différentes opinions de choisir rapidement leur camp pour un désistement intéressant car, à l’allure où vont les choses et compte tenu du fait que plusieurs espéraient un report, au lieu d’aller à un suicide programmé, il est encore temps pour eux de se rallier soit à Emmanuel Ramazani Shadary, soit à Martin Fayulu Madidi, soit à Félix Tshilombo Tshisekedi.
Encore une fois, point n’est besoin de rappeler que les personnalités engagées dans cette compétition obéissent à des univers internes qui échappent à l’analyse rationnelle traditionnelle. Il serait illusoire de croire qu’ils peuvent dans les semaines qui viennent poser ces actes, alors que certains parmi eux disent ne pas être prêts pour ces élections.
Les calculs vont aussi devoir changer au sein du front Commun pour le Congo (FCC) du fait de cette alliance car, elle est au cœur d’un fief électoral important à savoir l’Est et le Centre du pays, qui sont des bastions naturels de l’UDPS et de l’UNC.
On connait les capacités de mobilisation de Vital Kamerhe qui est resté au sommet des enjeux politiques depuis 20 ans et qui est de toutes les élections, soit comme directeur de campagne en 2006, soit comme candidat en 2011 et enfin, soit comme directeur de campagne en 2018.
Il faudrait à cet homme politique, véritable renard de surface, opposer un gabarit similaire pour éviter qu’il ne rafle pour son camp des voix importantes de l’Est, du Centre et de Kinshasa. Le candidat FCC qui est aussi de l’EST et qui bénéficier d’une machine puissante, se doit d’intégrer cette nouvelle donne et de faire avec s’il veut aussi l’emporter.
Quoique que l’on dise et quelle que soit la combinaison qui sera faite, il est établi que cette alliance vient de relancer substantiellement cette élection qui semblait, avant Nairobi, déjà bouclée. La voilà totalement relancée !
Robert Tanzey

Journaliste intéressé par les grands ensembles régionaux (Comesa, EAC etc), mais aussi intéressé aux questions environnementales et sécuritaires.
E-mail : patilunga35@gmail.com