Ni controverse, ni polémique, ni contradiction mais effarement et étonnement de tous, même de ceux qui ont mis en place un dispositif inédit d’un choix improbable dans un contexte d’extraterritorialité. Genève, dans la riche Suisse, au pays du lait, une guerre sans merci fut livrée ou les protagonistes étaient théoriquement dans un même camp, il est important que les différentes leçons soient tirées pour que les différentes postures soient comprises. Apres analyse des faits et confrontation des théories du pouvoir et du leadership en sciences politiques, il est venu le moment de tirer des conclusions provisoires certes, mais essentielles sur ce que sont devenus les mœurs politiques en RD. Congo.
On peut anticiper sans risque de se tromper que les choix des hommes dépend des circonstances et du contexte de leur production et que demain vont se développer d’autres grandes surprises. A Genève, sept hommes, sept chefs des partis, sept opposants se donnent rendez-vous pour choisir le meilleur d’entre eux pour porter les couleurs de l’offre alternative aux prochaines élections. Pendant conseillers et surtout de leurs familles biologiques. Le résultat nous le connaissons et les différents rebondissements de cette affaire politique à consonance sensationnelle. Mais quelles leçons tirer, car les hommes politiques peuvent agir avec raison en se basant sur leur droit et liberté, seulement les voies et les éléments de langage dont ils usent ont malgré eux symbole d’exemples et de pédagogie politique, c’est pourquoi ils doivent faire attention à tous les détails.
Que suggère Genève ?
Quatre grandes leçons, conséquences des postures contradictoires que l’on a observées à Genève.
1. Du combat pour l’inclusivité
Pendant longtemps l’opposition a défendu avec raison le combat des élections inclusives, élections qui devaient voir une participation la plus large du monde, avec des politiques privés de liberté et ceux contraints par multiples immobilités. Ce combat voulait que les élections tiennent compte de tous et permettent à chaque opinion de s’exprimer. On se souvient de l’épisode des prisonniers emblématiques et des préalables posés au pouvoir par celle-ci pour leurs possibles participations à des négociations. On pouvait se dire que ces idées qui ne devaient laisser personne sur le carreau étaient devenues un ancrage assumé en politique congolaise. Hélas c’était sans compter avec la versatilité philosophique des politiques congolais qui édictent des principes en phase de combat et qui ne les assument plus en phase de paix ou de conflit. C’est le cas de cette séquence de Genève qui a réuni des « candidats » à la présidentielle d’un certain « poids » à l’exclusion des autres candidats censés porter l’offre alternative. Comment des hommes qui ont combattu jusque récemment l’absence d’un processus inclusif peuvent se réunir à Genève sans aucun souci d’inclusivité et ne s’excusant même pas auprès des autres et estimant à leurs propres yeux qu’ils étaient à eux 7 l’expression substantielle de l’offre oppositionnelle ? C’est une contradiction dans une démarche et c’est souvent signalé par des grands sages comme un principe spirituel notamment celui de savoir que souvent on est porté soi-même par les défauts que l’on reproche à autrui. L’opposition n’a pas joué à l’inclusivité, ignorant royalement les autres vingt candidats qui se réclamant de cette même orientation idéologique. La défense d’une cause est une quête supérieure à une revendication. C’est une leçon majeure de savoir que vous êtes tenus à tout moment d’exprimer dans vos actes les valeurs que vous professez dans vos déclarations.
2. De la défense de l’action politique de la souveraineté et de l’autonomie
Dommage que l’un des pères fondateurs en l’occurrence Patrice Emery Lumumba ait placé la barre très haut dans le déroulé de la lutte de libération nationale. Cette phrase célèbre retentit encore comme un oracle sur l’espace politique congolais, quand il avait dit qu’un jour viendrait où l’histoire du Congo s’écrirait non à Bruxelles, ni à Washington, ni à Paris, mais au Congo. Il est vrai de son angle de perception il voyait au-delà de ces lieux physiques, il voyait la mainmise des forces extérieures sur le destin de la Nation, il voyait les pieuvres géantes du néo colonialisme se pointer et s’enraciner dans la pensée politique congolaise, il voyait une élite qui se battait pour résister aux appels d’une domination mentale. Le héros national avait bel et bien semé cette graine qui a produit des générations des nationalistes des plus diverses factures, mais ayant en commun la recherche de la dignité nationale. Pendant longtemps les opposants ont accusé Kinshasa d’être le bastion d’une occupation étrangère, et une campagne violente au travers des réseaux sociaux a donné des formes gargantuesques aux autorités les accusant presque d’être au service de l’étranger malgré les propos révoltés du porte-parole du Gouvernement.
Mais quel fut l’étonnement des maints observateurs de voir la même opposition dans sa partie la plus puissante dit-on, requérir la médiation d’une structure étrangère pour régler une question aussi nationale que le candidat commun. Comment peuvent-ils eux les porteurs des projets alternatifs continuer à condamner les autres alors que cette réunion de Genève s’est faite totalement sous le parrainage et le financement des forces extérieures. Quel est l’intérêt par exemple d’une fondation Kofi Anan dans la désignation d’un candidat commun ? Il y a des intérêts en jeu et les politiques congolais savaient bien qu’en acceptant ces aides visibles ils énervaient une opinion nationaliste. Il est essentiel de comprendre que la politique amène des aménagements qui peuvent aller dans le sens contraire des combats menés publiquement.
3. L’immixtion des bases dans les décisions de stratégie politique
A peine les super candidats ont annoncé leur décision concoctée dans le secret le plus absolu, qu’ils furent envahis par une avalanche des critiques venues des bas-fonds de la militance politique, ils ont vite appris que le temps des leaders charismatiques imposant leur volonté est en voie d’extinction, c’est désormais la dictature de la base qui s’applique. Cette situation qui parait anecdotique va devenir une véritable jurisprudence car les militants des partis se donnent les moyens d’exercer leur citoyenneté politique de la manière qui est la leur. On ne saura jamais ce qui a poussé les deux leaders d’abord à signer ensuite à retirer leurs signatures, mais une réalité s’est introduite dans le jeu politique, c’est la prise en compte des affiliés, des militants qui sont parties prenantes de la vision incarnée par les leaders qui sont désormais des portes paroles rien d’autre. Les meilleurs ne sont pas ceux qui sont en tête, les meilleurs restent avec la base et orientent les têtes pour éviter des dérives autoritaires. Ce sont là des réalités qui se sont invitées à l’analyse de l’après Genève. Il est vrai que cela pose un problème d’éthique sur la confiance à accorder aux propos et signatures des politiques, mais cela laisse entrevoir une autre réalité plus puissante à savoir celle qui indique qu’un homme politique , un vrai n’est jamais seul , qu’il est porté par un corps puissant d’intérêts concentrés.
4. Mise en cause du moyen utilisé pour faire le vote, manuel ou électronique ?
Tous présents ont accepté de voter là où un consensus était nécessaire, car il est possible d’aligner dans une même offre les ambitions concurrentes des personnes différentes, il est possible de concilier en politique les intérêts même croisés en stipulant que chaque réalité évoquée est prise en compte dans les différents drafts. Et comment considérer que 7 personnes aient pu voter et trouver le moyen de contester non seulement la procédure mais de retirer même leur vote ? Quel que soit la raison de cette volte-face, il rester néanmoins le fait révélateur d’une capacité de contestation qui frise les performances sportives et qui n’augure rien de bon pour la suite des élections de décembre.
Robert Tanzey

Journaliste intéressé par les grands ensembles régionaux (Comesa, EAC etc), mais aussi intéressé aux questions environnementales et sécuritaires.
E-mail : patilunga35@gmail.com