Pourquoi sommes-nous comme ça, nous, les africains ? Pourquoi ne réfléchissons-nous pas par nous-mêmes et en profondeur à certaines réalités de notre vie à l’intérieur de ce continent ? C’est quoi ces frontières que nous avons héritées de la colonisation ? Quelle valeur leur donnons-nous ? Les considérons-nous comme des limites, des murs de protection qui doivent nous isoler des dangers qui sont au-dehors ?

Avons-nous oublié que c’est en 1885, à Berlin en Allemagne que les puissances coloniales de l’époque ont pris un crayon pour effectuer le tracé de partage de l’Afrique qui se transformera par la suite aux frontières qui définissent aujourd’hui nos espaces de vie ?

Avons-nous oublié que ce tracé opéré par les colons n’avait nullement tenu aucun compte des réalités historiques, sociologiques et culturelles des peuples qui habitaient ces espaces géographiques ?

C’est ainsi que des royaumes et des empires africains d’autrefois ont vu leurs populations écarteler entre deux ou trois pays différents avec des régimes coloniaux différents. C’est ce qui est arrivé aux royaumes Kongo, Lunda, Tshokwe, au peuple Teke et autres qui ont vu leurs habitants se retrouver en République démocratique du Congo, en République du Congo, en Angola , en Zambie et même au Gabon pour ne considérer que la partie Ouest de la RDC.

La même réalité se retrouve en Afrique occidentale où les populations de l’empire Mandingue se retrouvent éparpiller sur plusieurs pays notamment le Mali, la Mauritanie, la Guinée, la Guinée Bissau, le Niger et le Sénégal. Ce sont ces pays qui constituent les frontières actuelles de l’empire Mandingue du célèbre Soundiata Keita.
Entre la RDC et l’Angola, il existe une frontière commune d’à peu près 1.700 kilomètres. Pouvez-vous imaginer un seul instant le nombre de contacts, de brassages entre les peuples, le nombre de mariages, le nombre d’échanges économiques et culturels entre les peuples d’Angola et du Congo ?

Pourquoi nous, les africains, ne pouvons-nous pas considérer ces frontières héritées de la colonisation comme des  » proximités « , au lieu de les considérer comme des limites ? Un déclic mental dans le chef des africains est impératif que tous les gouvernements se doivent de faire opérer.

En protégeant avec férocité ce tracé opéré au crayon sur la carte de l’Afrique par les puissances coloniales qu’on appelle  » frontières « , nous ne faisons que nous insérer sans réflexion aucune dans la logique du colonisateur. Ce qui est dommage pour une Afrique qui a lutté pour sa décolonisation !

A-t-on déjà évalué un jour le nombre des Bakongo qui sont angolais d’origine , ou des Pende, des Lunda, de Tshokwe qui sont des angolais d’origine ? Et pourtant toutes ces tribus sont fortement enracinées en République démocratique du Congo.

Pendant la longue guerre de libération de l’Angola, la République Démocratique du Congo a accueilli sur son sol plusieurs milliers d’angolais fuyant la guerre. Un quartier entier leur a été confié par les autorités zairoises, sans compter tous ceux qui s’y trouvaient déjà et habitaient les communes de Ngiri-Ngiri, Selembao et Bumbu. Leur acceptation par les Congolais et leur intégration dans la société congolaise ont été totales.

Il en a été de même pour les Congolais de Brazzaville.

Mais jamais la République Démocratique du Congo n’a un jour considéré ces Angolais ou ces Congolais de Brazzaville comme des envahisseurs venus nous disputer le pain et le lait.

D’où viennent alors ces dispositions à l’agressivité et à la violence vis-à-vis des Congolais qui animent tous nos voisins ?

Le moment est venu pour les Congolais de réfléchir quant à l’attitude à adopter et aux réponses à réserver dans l’avenir.
Mais je ne conseille pas que nous fassions comme les autres. Nous ne pouvons pas changer notre nature à cause de la méchanceté des autres !

François Ndjeka, Philosophe.

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