Personne n’ose le dire, tous estiment que les choses vont très vite, certains s’accrochent à des préalables qui sont en fait des appels à discussions, car les arguments qui sont proposés comme réponses n’entrent pas dans la logique des Etats-majors. Chaque jour qui passe, comme dans un sablier, le temps s’égrène et nous nous retrouvons à quelques nonante jours du 23 décembre, jour prévu pour les élections. Au sein de l’opinion, il y a comme un doute, la surabondance des messages pessimistes a fini par un créer un doute dans la matérialisation des actes du calendrier électoral. Et pourtant la Ceni a accompli son devoir à la lettre, respectant les échéances et produisant à chaque étape des résultats, qu’elle soumet aux critiques des évaluateurs. Nous sommes à l’étape de la publication des listes définitives après le contentieux de la Cour Constitutionnelle, les listes des candidats sont affichées et l’on est dans la dernière ligne de l’organisation du scrutin. S’agissant des moyens techniques et financiers, la Ceni se remet au plan de décaissement du gouvernement qui dit qu’il va seul assumer le financement de ces élections. Il y a comme un rideau opaque qui ne montre pas ce qu il y a après le 23 décembre 2018. On arrive à des conjurations du sort et des incantations vaudous pour avoir l’attitude idoine.
A cette allure, il n y a rien qui empêcherait le respect de cette date par tous, mais en même temps des voix se lèvent pour dire qu’il n y aurait pas élections au 23 décembre 2018. Pour quelles raisons ? C’est ici le lieu d’aller jusqu’ au bout de la réflexion et de comprendre les causes profondes de cette apparente hypocrisie générale. Certains groupes proches de l’opposition estiment que la Ceni ne dit pas la vérité, qu’elle ne sera jamais prête pour organiser le scrutin. Cette argumentation est construite sur des supposés délais de livraison de la machine à voter, du délai des rotations et surtout de la lourde quantité des pièces à ramener de la Corée. Comment ceux qui ne sont pas dans la structure peuvent être certains de leur calcul et penser voir mieux que la Ceni ?
La vérité est si évidente, si grosse qu’elle souffre de sa simplicité même, elle est en rapport avec la nature même de notre classe politique qui est vrillée à la surenchère politique. Entre négocier et laisser le peuple décider de son sort, plusieurs politiques de notre pays feront le choix d’accéder au pouvoir par le moyen des palabres et discussions. Les sections représentent un risque qu’ il n’est pas facile à tous de prendre. Tant qu’il n’a pas la certitude de les gagner le politique congolais voudrait éviter les élections et conserver sa posture par des manœuvres dilatoires. Comment va réagir la majorité au pouvoir ? Il est vrai que la responsabilité d’organiser les élections revient au Gouvernement. Celui-ci pourra t il y aller même si une partie de l’opposition s’y refuse au motif de la machine à voter ? L’opposition pense-t-elle que les raisons évoquées à ce jour par elle sont-elles suffisantes pour boycotter les élections ? Voilà des questions qui embarrassent plus d’un ; mais qui ne peuvent souffrir d’un silence dans les jours qui viennent.
Négocier ou aller aux élections ? A ceux à qui a posé cette question les réponses furent contrastées. Tous veulent aller aux élections, mais chacun veut y ajouter un ingrédient de son cru, alignant des préalables et des peurs parfois infondées, parfois justifiées au point qu il y a comme une demande muette mais fortement ressentie d’une rencontre au sommet des ambitions. La Ceni a certainement besoin du temps supplémentaire pour arrondir ses délais devenus incompressibles, mais jamais elle ne le dira pour éviter l’indexation. Le Gouvernement a besoin du temps pour mobiliser davantage des moyens er s’occuper sérieusement de la question de la sécurisation de ces élections. On parle même des 100 milles policiers à recruter pour la circonstance.
L’opposition a besoin du temps pour mobiliser ses troupes et réunir les moyens de faire face à une campagne électorale qui sera mortelle pour ceux qui auront des moyens insuffisants pour convaincre un électorat qui somme toute est affamée et impatiente. La communauté internationale après avoir usé des pressions sur la RDCongo est prise de court par la soudaineté de la posture du président Kabila qui a accompli ce qu’il a promis. Il leur faut désormais s’impliquer dans le processus et trouver les moyens de contrôler au moins en partie l’issue de cette séquence. Voilà pourquoi ils ont aussi besoin du temps pour trouver le bon angle d’attaque.
Mais qui aura l’initiative de cette prolongation ? Personne n’a le courage politique d’affirmer cela mais tous espèrent qu’une partie prenante prendra ce risque et donnera le temps qui convient. Pour ceux qui restent droits dans leurs bottes et froids dans leurs têtes, il est impérieux de faire bouger les postures radicales et de commencer une approche consensuelle de ce qui reste des manœuvres. Négociations ou Elections ? Les deux sont compatibles quand seulement l’un est un moyen d’arriver à l’autre, et non d’empêcher d’arriver.
Adam Mwena Meji

Journaliste intéressé par les grands ensembles régionaux (Comesa, EAC etc), mais aussi intéressé aux questions environnementales et sécuritaires.
E-mail : patilunga35@gmail.com