Septuagénaires ou octogénaires, ils ont raflé la mise aux élections législatives provinciales. Et grâce ou malgré leur âge, les électeurs leur ont fait confiance. Leur élection comme députés provinciaux a valeur d’enseignement. Au-delà de l’admiration que cela peut susciter, il y a, pour les observateurs avertis de la scène politique congolaise, des leçons à tirer de leur plébiscite.
L’une des premières leçons que ces cadors ont comprises, c’est qu’en politique, pour durer, la chose la plus importante à faire c’est qu’il est impératif de se doter d’une identité propre à soi. Qu’il s’agisse de Célestin Mbuyu dans le Haut-Lomami, de Gabriel Kyungu dans le Haut-Katanga, de Jean-Marie Bulambo dans le Sud-Kivu, de José Endundo dans la province de l’Equateur, ces doyens ont une personnalité affirmée et une identité propre. Ils ont accumulé de l’expérience et ils sont dans une posture où ils agiront beaucoup plus pour passer le témoin aux générations futures, à la postérité.
Ces doyens ont le secret de la durée et ne se sont jamais coupés de leurs fiefs politiques. Ils ont une base politique chacun et ils ont toujours eu plusieurs casquettes au cours de leurs carrières. Pour eux, l’adhésion idéologique et politique est une très bonne chose. Mais à leurs yeux, ce n’est pas cette adhésion qui fait durer un acteur sur la scène politique. La protection continue des intérêts de la base est le moteur de la réussite et de la longévité politique. Car, il faut le dire, aussi longtemps que le peuple retrouve son intérêt, il s’intéresse peu des casquettes et des couleurs politiques des acteurs. A voir de plus près, l’élection de ces « anciens» par des électeurs pour la plupart jeune, fait comprendre qu’il y a toujours eu un pont entre eux et leur électorat. L’on comprend mieux pourquoi on dit que la politique est le domaine par excellence de la protection des intérêts.
Les doyens, rompus à la culture politique, ont su jouer à bon escient avec ce facteur non négligeable qui est le temps. Ce temps qui ne peut être un facteur positif et bénéfique que si la décision d’engagement a été mûrement réfléchie.
Portraits de ces anciens qui ont pignon sur rue
Gabriel Kyungu Wa Kumwanza
(80 ans)
Né le 24 octobre 1938 à Ankoro, de Marcel Kabulo Mwenda, son père et d’Alphonsine Kibawa, sa mère, Gabriel Kyungu Wakumwanza est une grande figure de la scène politique de la RDC. Leader charismatique de l’Union Nationale des Fédéralistes congolais (UNAFEC), Kyungu fut parmi les 13 Parlementaires et cofondateurs de l’UDPS en 1982.
Agé de plus de 80 ans aujourd’hui, Antoine Gabriel Kyungu wa Kumwanza, affectueusement appelé « Baba wa Katanga » entendez « Le père du Katanga », était gouverneur du Katanga, président de l’Assemblée provinciale et proche collaborateur de l’ancien Premier ministre Nguz Karl –i-Bond. Dans son parcours politique, cet homme, a été un opposant de première heure au régime de feu le Président de la 2e République, Mobutu Sese Seko.
Membre de la Majorité présidentielle de l’ancien Président de la République Joseph Kabila Kabange, avant de passer ensuite dans les rangs de G7, un regroupement des opposants au régime Kabila. Aux scrutins de 2018, ce « Baba wa Katanga » a bénéficié de sa popularité pour se faire élire aux législatives nationales et provinciales. Etant le plus âgé dans les deux parlements, il est désigné président provisoire de l’Assemblée nationale. Mais il garde encore la main pour être, qui sait, à la tête de l’Assemblée provinciale du Haut-Katanga. Va-t-il opter pour l’Assemblée nationale au détriment de celle du Haut-Katanga ? Difficile de répondre à cette question.
Rappelons, par ailleurs, qu’on le reconnait au travers de sa célèbre phrase : « l’autonomie totale du Katanga ». L’ex-gouverneur du Katanga a travaillé également dans l’Administration publique. L’actuel président de l’Assemblée nationale a d’abord travaillé de 1965 à 1968 aux côtés de l’ancien ministre des Sports, Augustin Kibasa Maliba. Fédéraliste convaincu sur les traces de Moise Tshombe, Antoine Gabriel Kyungu a créé le parti UFERI avant de réussir de faire restaurer la mémoire de Moïse Tshombe, en rebaptisant certaines places publiques, comme la place de la Poste, aujourd’hui appelé « Place Moise Tshombe ».
José Endundo Bononge
(75 ans)
Pharmacien de formation, José Endundo Bononge président provisoire de l’Assemblée provinciale de la province de l’Equateur. Il est né le 8 août 1943 à Tondo dans le territoire de Bikoro en province de l’Équateur. Dans l’histoire l’on retiendra que cet homme a eu à exercer différentes fonctions dans les entreprises publiques en République démocratique du Congo, notamment l’Office Congolais de Contrôle (ex-OZAC) et l’Office des Routes. Il a aussi occupé les fonctions de Président de la Chambre de Commerce Franco-Zaïroise.
Il rejoint le Rassemblement Congolais pour la Démocratie (RCD) pour un bref moment avant de rejoindre le Mouvement de Libération du Congo (MLC) de Jean-Pierre Bemba Gombo dans lequel il sera l’un des acteurs les plus influents.
À la mise en place du Gouvernement de Transition, il est nommé Ministre des Travaux Publics et Infrastructures. Il quittera ce poste après qu’une commission parlementaire l’accuse de corruption. Ce natif de l’Equateur a été aussi ministre de l’Environnement et du Tourisme.
Toujours ambitieux dans tout ce qu’il entreprend, l’homme va s’associer avec d’autres personnalités politiques pour créer un nouveau parti politique dénommé Union Nationale des Démocrates Chrétiens (UNADEC) qui ne fera pas long feu à cause des différences de vue dans la direction du parti. Il créera un nouveau parti dénommé le Parti Démocrate Chrétien (PDC).
Soucieux de servir sa province d’origine, José Endundo a, aux élections organisées fin 2018 été élu député provinciale. Une élection qui fait de lui, grâce à son âge avancé, président provisoire de l’Assemble de provinciale.
Jean-Marie Bulambo Kilosho
(66 Ans)
Il conduit l’Assemblée provinciale du Sud-Kivu du fait de son âge. A 66 ans, il est le doyen des élus du Sud-Kivu. Jean-Marie Bulambo est un homme politique originaire de la Province du Sud Kivu en République démocratique du Congo. Il est membre du Parti de l’Alliance Nationale pour l’Unité. Il est aussi Député National pour la circonscription électorale de Bukavu. Il a créé son parti politique Parti National pour la Démocratie et la République ‘PANADER’ depuis 2010.
Né à Mwenga le 2 mars 1952, Jean Marie Bulambo Kilosho est un homme fiscal expérimenté. Il a occupé plusieurs positions dans l’administration fiscale tant au niveau national que provincial en République Démocratique du Congo. Dans ce cadre, il a établi une étude fiscale compétitive, sure et soutenable pour le recouvrement des recettes de l’État, en créant la Direction Générale des Recettes Administratives, Judiciaires, Domaniales et de Participations, DGRAD. Ce qui fit l’un des succès majeurs de son premier mandat de 1er Directeur Général dudit service de 1995 à 1998, puis, Secrétaire Général de l’Administration publique où il prend sa retraite le 2 janvier 2010 du moins pour ce qui est de l’administration.
L’action de Jean-Marie Bulambo pour placer la politique de recouvrement de l’État au cœur de la fiscalité en RDC fut décisive. Il a aussi milité au sein d’associations politiques et sportives. Avant son élection, Jean-Marie Bulambo Kilosho avait été directeur au sein de la Direction Général des Impôts (DGI).
Février 2010, Bulambo est nommé ministre de l’Economie sous le quota de PANU (Parti Nationale de l’Alliance pour l’Unité). Il vient en remplacement de l’initiateur de ce parti, André Philippe Futa, décédé au cours d’un voyage de travail. Homme de conviction, Bulambo déclara lors de sa prise de fonction en tant que ministre : « Nous puiserons dans ce que nous avons comme énergie pour ressortir avec le concours du personnel et de l’encadrement du Chef de l’État Joseph Kabila. Le pays est le nôtre, le besoin de son développement, son envol économique sont aussi important », avait-il conclu.
Céléstin
Céléstin Mbuyu Kabango
(72 ans)
Le député provincial Celestin Mbuyu Kabango Mukolwe, 72 ans, a été désigné président de ce bureau provisoire, étant le plus âgés des membres de cet organe délibérant, conformément à la Constitution de la République. Le président Célestin Mbuyu a défini à l’intention de ses collègues, dont la plupart exercent pour la première fois la fonction parlementaire, les missions dévolues à un député, celles de contrôler l’exécutif provincial et d’élaborer des édits.
«Le député provincial ne doit pas abandonner son rôle pour se substituer au chef coutumier ou au juge… Le contrôle de l’exécutif ne doit pas être intempestif, mais ordonné pour l’efficacité de la collaboration entre ces deux institutions provinciales», a-t-il dit les appelants au sens élevé de responsabilité.
Celestin Mbuyu Kabango Mukolwe est le premier gouverneur de la province du Haut Lomami issue du démembrent de la province du Katanga. Il a été destitué par l’Assemblée provinciale après deux ans à la tête de cette entité.
Célestin Mbuyu fut Secrétaire Général à l’Economie avant sa nomination au Gouvernement d’Antoine Gizenga en tant que Vice- Ministre au budget sur la liste du Parti du Peuple pour la Reconstruction et la Démocratie (PPRD). En octobre 2008, il est nommé ministre de l’Intérieur et Sécurité dans le gouvernement Muzito. Après le remaniement du 19 février, il quitte le budget pour devenir ministre des hydrocarbures. Mbuyu est l’un des cadors avec lesquels il faut compter pour préparer les générations à venir dans la gestion des affaires publiques.
Patrick Ilunga et Clément Dibwe

Journaliste intéressé par les grands ensembles régionaux (Comesa, EAC etc), mais aussi intéressé aux questions environnementales et sécuritaires.
E-mail : patilunga35@gmail.com